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Santé

Grippe ou Covid-19: comment différencier les symptômes?

Même si le pic de l’épidémie semble avoir été atteint et dépassé en février, la grippe saisonnière et le Covid-19 sévissent toujours avec plus ou moins de virulence dans nos régions. Le point avec trois spécialistes romandes. 

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Virus de la grippe

Virus de la grippe: les pointes d’hémagglutinine (vertes) participent à l’attachement du virus aux cellules respiratoires humaines. 

Science Photo Library RF/Getty Images

«Je suis resté dix jours cloué au lit. Ça doit bien faire trente ans que je n’ai pas été malade pareillement. Maintenant, ça va mieux. Mais doucement.» Ce message d’un ami quinquagénaire suscite bien sûr de l’empathie mais me console aussi un peu au moment où mon thermomètre indique 39°C. D’autant qu’un instant auparavant un autre m’avait confié qu’il avait été contraint de rester cloîtré chez lui avec femme et enfants pendant toutes les vacances de carnaval pour les mêmes raisons. Grrr! La poisse. Il m’a dit avoir pris son mal en patience en apprenant par son médecin que beaucoup de Romandes et de Romands subissaient le même triste sort.

De bouche à oreille, on finit par penser que la moitié de la population du pays est mise hors jeu et KO par la grippe saisonnière et/ou le Covid-19 qui, si l’on en croit les commentaires, s’avèrent particulièrement virulents et tenaces cet hiver. «Il s’agit d’une impression d’une partie de la population pour laquelle nous n’avons pas de données chiffrées, recadre la doctoresse Gaud Catho, médecin adjointe au service des maladies infectieuses de l’Hôpital du Valais. Les complications telles qu’une pneumonie ou une angine à streptocoque ne font pas l’objet d’une surveillance, donc il n’est pas possible de quantifier cette impression.»

Incidence en déclin


Même discours à l’autre bout du Rhône, où sa consœur la doctoresse Ana Rita Gonçalves Cabecinhas, biologiste aux HUG et responsable du Centre national de référence de l’influenza (CNRI), ne signale pas un impact de la maladie plus sévère. «Je n’ai pas connaissance d’une augmentation anormale des surinfections bactériennes dues aux infections grippales au cours de la saison 2023-2024.» Renseignement pris auprès des cantons, la situation semble partout sous contrôle. «Dans le Jura, le seuil historique d’épidémie de grippe a été franchi fin janvier, ce qui corrélait bien avec le taux de consultations et d’hospitalisations en raison de la grippe. Depuis dix jours, nous voyons une diminution graduelle, avec la moitié de cas détectés par rapport au pic de fin janvier-début février dans notre établissement. Par rapport au Covid-19, nous avons vécu la même dynamique qu’au niveau national, avec des taux très importants en novembre et décembre 2023», commente la doctoresse Michèle Birrer, médecin adjointe au service d’infectiologie, hygiène hospitalière et médecine tropicale et du voyage à l’Hôpital du Jura. «L’incidence du Covid-19 est basse. Cela pourrait être imputé à une baisse du nombre de dépistages, ces derniers n’étant nécessaires que pour des cas particuliers. Toutefois, selon les données de la surveillance des eaux usées, le pic de coronavirus SARS-CoV-2 est dépassé et le taux de détection du virus est bas, avec une tendance à la stagnation», ajoute Ana Rita Gonçalves Cabecinhas.

Grippe saisonnière et covid: bonnet blanc, blanc bonnet


Grippe saisonnière (Influenza A et B) ou covid, comment les distinguer? «De manière générale, il est difficile, voire impossible pour un médecin de faire la différence entre une grippe et un Covid-19 sur la base des symptômes uniquement», concèdent la thérapeute genevoise et sa consœur valaisanne. Un constat que développe leur collègue de Delémont. «Covid-19 et influenza sont des virus respiratoires qui produisent une palette de symptômes assez large et similaire, d’asymptomatique jusqu’à un état sévère. Mal de gorge, nez qui coule, toux, dyspnée (sensation d’une respiration difficile et inconfortable), fièvre, céphalées, fatigue, diarrhée, nausées, vomissements... Avec, en plus, l’altération du goût et de l’odorat, plus fréquente avec le Covid-19. Mais les symptômes peuvent beaucoup varier d’une personne à l’autre. Seul un test de détection des virus apporte une réponse claire.»

 

Gestes barrières toujours conseillés


Autre question qui partage l’opinion: l’efficacité du vaccin contre la grippe saisonnière. Est-elle avérée et, si oui, vaut-il encore la peine de le faire même si, de l’avis général, l’épidémie est en déclin – bien qu’on ne puisse pas écarter un sursaut via l’Influenza B, préviennent nos interlocutrices? «Cette saison, la vaccination disponible en Suisse contre la grippe couvre le virus qui circule en grande quantité (Influenza A H1N1 pdm09). Dans la réalité, sa protection varie beaucoup et se situe quelque part entre 40 et 60%. Par contre, même si celle-ci est loin d’être excellente, le but du vaccin est avant tout d’éviter une évolution grave de la maladie. Dès lors, il est évident que la vaccination contre la grippe diminue de manière importante la sévérité de la maladie, réduit le risque d’hospitalisation et la mortalité associée, surtout dans le groupe de personnes à risque», détaille la doctoresse Birrer, qui insiste sur l’importance de protéger les personnes vulnérables durant les mois d’hiver. «La pandémie de covid nous a appris comment chacun pouvait contribuer à sa propre santé et à celle de son entourage proche. Ainsi, appliquer l’étiquette respiratoire (limitation des risques de propagation du virus) en ayant une bonne hygiène des mains, éviter les contacts humains inutiles en cas de maladie grippale et ne pas hésiter à porter un masque en cas de symptômes respiratoires aigus font toujours partie des comportements qui limitent la transmission. Mais il est clair que le moment optimal de la vaccination est avant la vague de grippe. Si elle est effectuée en automne (octobre ou novembre), la protection peut se mettre en place et le bénéfice est maximal. Actuellement, la circulation du virus est déjà un peu moins forte, du moins dans notre canton, et on s’approche plutôt de la fin de la saison de la grippe. Une vaccination aujourd’hui est certes tardive, car le corps a besoin de dix à quatorze jours pour développer la protection, mais si vous êtes une personne à haut risque, elle peut encore s’avérer utile.»

2024, bon «millésime» de vaccin


Pour Gaud Catho, l’efficacité du vaccin dépend de différents facteurs tels que l’âge et l’immunocompétence de la personne, mais également des souches incluses dans le vaccin qui sont déterminées six mois avant le début de l’épidémie afin de pouvoir anticiper la production. «Les souches circulant actuellement sont principalement du virus de la grippe A avec deux sous-types qui sont inclus dans le vaccin administré. Une récente publication canadienne (www.cdc.gov/mmwr/) et une autre référence récente (www.eurosurveillance.org) évaluent son efficacité, laquelle varie selon les sous-types de vaccination. Il faut compter environ deux semaines de délai après la vaccination pour que le vaccin soit efficace. Etant donné que le pic de l’épidémie semble derrière nous, on peut s’attendre à une nette diminution des cas d’ici un mois. Se vacciner maintenant présente donc un bénéfice relativement limité.»

Efficacité pas mesurée


En réalité, il n’y a pas de mesure d’efficience vaccinale pour la grippe en Suisse, confie Ana Rita Gonçalves Cabecinhas. «Toutefois, les données disponibles dans d’autres pays indiquent une bonne reconnaissance des virus circulants par les anticorps produits par les individus vaccinés, suggérant ainsi une bonne protection. Tant que le virus circule dans la population, le vaccin reste utile», estime-t-elle pour sa part. Une recommandation qui ne manquera sans doute pas de susciter les controverses et autres querelles habituelles... 

 
Par Christian Rappaz publié le 9 mars 2024 - 07:02