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Belinda Bencic, prodige à 14 ans, championne olympique et sportive de l'année à 24

En 2011, L'illustré révélait au public la jeune Belinda Bencic, alors tout juste âgée de 14 ans. La Saint-Galloise était déjà N° 10 suisse et venait de remporter les Masters juniors d’Europe. A l'époque nous disions qu'elle était «le plus sûr espoir féminin du tennis helvétique», entrainée par la mère de Martina Hingis. Alors qu'elle vient d'être couronnée sportive suisse de l'année, redécouvrez son portrait. Bravo Belinda!

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Tokyo 2020 Olympics - Tennis - Women's Singles - Medal Ceremony - Ariake Tennis Park - Tokyo, Japan - July 31, 2021. Gold medallist Belinda Bencic of Switzerland celebrates on the podium with silver medallist, Marketa Vondrousova of Czech Republic and bronze medallist, Elina Svitolina of Ukraine REUTERS/Edgar Su

Belinda Bencic a remporté l'or face à Marketa Vondrousova en finale des JO à Tokyo (7-5 2-6 6-3).

Reuters

Mêmes débuts précoces, même entraîneur en la personne de Melanie Molitor, mêmes origines slovaques et enfance saint-galloise. Difficile d’échapper à l’irrésistible envie de lier le destin de Martina Hingis à celui qui attend peut-être Belinda Bencic, 14 ans, jeune prodige du tennis helvétique. «C’est vrai qu’on me compare souvent à Martina, avec qui j’ai d’ailleurs la chance de jouer régulièrement, explique Belinda. Ça me plaît, car je l’admire beaucoup, mais on est deux joueuses différentes évoluant à deux époques différentes.» Une comparaison dont se garde aussi Melanie Molitor, la mère de Martina Hingis: «D’autant que le tennis a évolué: le matériel actuel implique un jeu beaucoup plus rapide, et le physique des filles du circuit exige encore davantage de préparation qu’avant.»

PREMIER TOURNOI À 4 ANS
Loin des projecteurs, la mère de Martina Hingis a vite repris du service après la retraite de sa championne de fille et entraîne depuis huit ans une centaine de jeunes, en collaboration avec le Tennis-Club Ried de Wollerau, dans le canton de Schwytz. Dont Belinda Bencic, N° 10 suisse, sur les courts depuis l’âge de 2 ans et demi. La plus jeune du top 20 helvétique (Xenia Knoll, classée 9e, juste devant elle, a déjà 19 ans). La première de l’histoire du pays à avoir remporté les Masters des meilleures joueuses d’Europe de 14 ans et moins. C’était en octobre dernier en Italie. Quelques jours plus tard, elle jouait les qualifications de son premier tournoi WTA, chez les pros, au Luxembourg, battue d’entrée en trois sets par une Russe de 16 ans. Une défaite paradoxalement des plus bénéfiques. «Belinda n’a pas encore très bien compris qu’il faut parfois souffrir un peu, explique Melanie Molitor. Mais c’est normal, elle est encore jeune et apprendra avec le temps.» Du haut de son mètre septantedeux, Belinda Bencic manifeste pourtant déjà la détermination qui a fait les plus grands de son sport. «Je joue au tennis tous les jours depuis l’âge de 4 ans, alors, franchement, je ne me suis jamais posé la question de savoir ce que je ferais d’autre dans ma vie», confie-t-elle dans un anglais déjà bien maîtrisé. «Je l’ai appris à l’école et pendant les six mois que j’ai passés avec ma famille en Floride.» Un voyage effectué à l’automne 2003 dans le but de prendre la température du potentiel de Belinda auprès de spécialistes du tennis outre-Atlantique. La jeune Suissesse n’a alors que 6 ans mais fait montre d’un talent déjà remarquable et a disputé de nombreux tournois.
 

Belinda Bencic 6 ans

A 6 ans, en Floride, où Belinda et sa famille partent six mois pour mesurer le potentiel de la joueuse

DR

JOURNÉES-MARATHON
C’est au retour de Belinda des Etats-Unis, au printemps 2004, que Melanie Molitor devient son entraîneur et l’accueille dans son école de Wollerau.

De leur village saint-gallois d’Oberuzwil, la famille Bencic déménage dans la petite bourgade schwytzoise. «Parce que chaque minute compte dans un emploi du temps aussi chargé», explique Ivan Bencic, le père de Belinda. C’est que le quotidien de la jeune championne est une véritable course contre la montre. Lever à 6 h 45, école de 7 h 45 à 10 heures (elle est en dernière année de scolarité obligatoire), entraînement privé de 10 h 30 à midi. Puis retour à la maison, où Dana, la maman, ancien modèle aujourd’hui femme au foyer, veille à ce que le repas soit prêt dès l’arrivée de Belinda. Histoire qu’elle ne reparte pas l’estomac trop lourd pour l’entraînement de l’après-midi, prévu de 14 à 16 heures, suivi d’une séance d’entraînement physique. Un emploi du temps qui nécessite aussi une discipline de fer à la maison. Coucher à 21 h 15, extinction des feux à 21 h 30. Le prix à payer pour se donner les moyens de ses ambitions quand on vise une carrière dans le tennis de haut niveau. Des sacrifices consentis par le reste de la famille aussi. Employé dans une assurance, Ivan, le papa, a dû aménager ses horaires de manière à pouvoir être présent la journée auprès de sa fille. Même Brian, le petit frère de 11 ans, est mis à contribution. «C’est le sparring- partner de Belinda sur quelques tournois. Il est jeune, mais a déjà un très bon niveau», assure son père.

Belinda Bencic dans sa chambre d'adolescente

Belinda dans sa chambre, où les posters de ses stars préférées côtoyaient les trophées qu’elle avait déjà gagnés. «Je ne sais pas combien j’en ai remporté, je préfère compter les défaites», plaisantait-t-elle.

Fabienne Buehler


UNE ADO COMME LES AUTRES
Pour autant, Belinda est une ado comme les autres, qui écoute Beyoncé et Rihanna, affiche les posters de ses idoles sur les murs de sa chambre, adore les fringues et rêve d’un dressing géant, raffole des lasagnes et du thé froid, n’aime pas trop l’école et préfère passer du temps avec ses copines ou jouer avec Sissi, le chat de la maison. «Nous essayons de lui offrir la vie la plus normale possible.

Belinda en famille

Avec ses parents, Dana et Ivan, et son petit frère Brian, 11 ans, dans le salon de leur maison de Wollerau.

Fabienne Bühler

C’est très important pour son équilibre et celui de toute la famille», confient Ivan et Dana Bencic. Pas question, donc, pour eux, d’interdire à leur fille de faire du roller, du ski ou de l’équitation, ni de la surprotéger sous prétexte qu’elle pourrait se blesser. D’autant que, même si elle constitue un des plus sûrs espoirs de la relève du tennis féminin en Suisse, rien n’est encore joué. «Elle a un potentiel énorme, confie Melanie Molitor. C’est une joueuse très régulière, qui se blesse rarement. Mais le circuit junior n’a rien à voir avec le circuit professionnel, et le passage de l’un à l’autre suscite souvent beaucoup de déceptions», prévient la mère de Martina Hingis.

>> Lire aussi: Belinda Bencic, enfin une héritière de Martina Hingis?

Sur le court, Gino, le berger belge de Melanie Molitor, rapporte docilement les balles à sa maîtresse. «Il y a toujours eu un chien au bord du terrain», raconte l’entraîneur. Martina avait Zorro, aujourd’hui il y a Gino. C’est important d’habituer les jeunes joueurs à rester concentrés malgré l’agitation alentour», confie

Belinda Bencic

Entraînement privé avec Melanie Molitor et son chien Gino. Une présence excellente pour habituer les jeunes joueurs à rester concentrés.

Fabienne Bühler

Melanie Molitor entre deux instructions lancées en tchèque à Belinda. «Le tchèque et le slovaque sont très proches», explique la mère de Martina Hingis, qui s’exprimait dans cette langue avec sa fille aussi. En face, Tino Seidel, 37 ans, le sparring-partner de Belinda, renvoie les balles et lâche des «merci» les rares fois où l’adolescente en envoie une dans le filet: «Elle est difficile à jouer, car elle commet très peu de fautes. Ses coups sont sûrs et déjà très agressifs.»

APPEL AUX SPONSORS
L’après-midi est réservé aux entraînements en groupe. Tours de terrain, corde à sauter, haies, matchs de foot, de basket ou de handball. «Les sports d’équipe les habituent un peu à la douleur et au contact physique, explique Ivan Bencic. Et puis cela renforce leur compétitivité. Chacun veut faire mieux que l’autre», poursuit le père de Belinda, qui apprend tous les jours au côté de Melanie Molitor. «Beaucoup de parents pensent qu’il suffit de remettre leur enfant entre les mains d’une académie la semaine et de les coacher le week-end en tournoi. Je pense que c’est très important de suivre aussi ce qui se passe pendant les entraînements.»

En plus de Yonex et d’Adidas pour les raquettes et l’équipement, la joueuse est sponsorisée par le diamantaire Zipangu et la société immobilière Forol AG. «Nous sommes en train de chercher des sponsors supplémentaires, car les coûts sont en constante augmentation. Belinda joue de plus en plus de tournois à l’étranger et, entre l’avion et l’hôtel, notre budget devient serré», confie Ivan Bencic. Début décembre, la Suissesse s’envolera d’ailleurs en Floride, où elle participera à l’Orange Bowl, sorte de championnats du monde juniors de tennis. Là même où s’imposait en 1998 un jeune joueur inconnu du nom de... Roger Federer.

Par Aurélie Jaquet/L'Illustré publié le 16 novembre 2011 - 17:20, modifié 13 décembre 2021 - 10:00