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Brigitte Rosset: «Avec l’amour, on abolit les différences»

A l’occasion de la rentrée scolaire, six personnalités romandes parlent avec émotion de la maîtresse ou du maître qui les a le plus marqués. Brigitte Rosset, comédienne et auteure genevoise, 52 ans, a eu comme première maîtresse d’école Claudine Amacker à l’école primaire Saint-Antoine (GE). Une rencontre bouleversante pour la petite fille qu’elle était.

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Brigitte Rosset

«On aimait tellement Claudine, que, même les jours de congé, on voulait venir à l’école», Brigitte Rosset.

Blaise Kormann
Didier Dana

Son histoire a les contours tendres et vrais d’un dessin de Sempé. Entre 4 et 6 ans, la maîtresse de Brigitte s’appelait Claudine Amacker. Elle enseignait à Genève, à l’école primaire Saint-Antoine, en Vieille-Ville. «Claudine, c’était la grâce. On l’aimait tellement que, même les jours de congé, on voulait aller à l’école. Avec ses longues tresses retenues par des pinces en forme de papillon, elle était merveilleuse. Elle avait un amour absolu pour ses élèves.» La petite fille rêvait d’être coiffée comme elle.

«J’avais le sentiment d’être unique à ses yeux. Avec Claudine, rien ne pouvait m’arriver. Dans la classe, ça sentait la pâte à modeler et, dans l’air, flottait l’odeur des stencils.» Un matin, les bambins apprirent une grande nouvelle: Claudine était enceinte, elle devait s’absenter. «Nous avons eu une remplaçante et, un beau jour, Claudine est venue à l’école avec son bébé.» C’était une fille, prénommée Julie. Le destin a voulu qu’elle naisse lourdement handicapée. «Elle avait une tête disproportionnée, mais, à mes yeux, c’était le plus beau bébé du monde. Claudine la promenait dans une sorte de carrosse en bois.» Parfois, lorsqu’ils se penchaient sur ce grand berceau, les adultes tressaillaient.

«Claudine, elle, se fichait du qu’en-dira-t-on. Elle prenait son enfant dans ses bras à la terrasse des cafés ou lui donnait le sein à la promenade de la Treille, ça horrifiait les dames de la Vieille-Ville. Elle, elle assumait et s’affirmait.» Les élèves, eux, ne jugeaient ni la mère ni l’enfant. Ils ne s’effrayaient pas de l’apparence de ce petit être. «Lorsque nous les croisions, nous courions vers elles. On formait une grappe d’enfants et on s’exclamait: «Bonjour Claudine! Bonjour Julie!»

 

Brigitte Rosset

Claudine et sa classe: les petits élèves, parmi lesquels Brigitte (deuxième rang avec une blouse bleu ciel), réunis avec Mme Amacker à l’école primaire Saint-Antoine, dans la Vieille-Ville de Genève.

Blaise Kormann

Brigitte Rosset n’a pas retrouvé la trace de cette enseignante, en revanche, elle sait que le bébé n’a pas survécu. Claudine, en témoignant de l’affection à sa classe, a rendu chaque élève plus généreux. «Avec l’amour, on fait tout. Elle nous a nourris de ça. La différence, c’est le regard que l’on porte sur les autres. C’est une inoubliable leçon de vie.» 

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Par Didier Dana publié le 26 août 2022 - 08:32