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Musique

Caroline Alves, une âme soul au firmament

Début juillet, la chanteuse romande s’est produite devant 90 000 personnes en première partie du groupe Coldplay au stade du Letzigrund à Zurich. Rencontre avec Caroline Alves, lauréate d’un Swiss Music Award en 2021, chez elle à Bienne.

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La chanteuse Caroline Alves

La chanteuse de 26 ans chez elle, au cœur de Bienne, où elle vit depuis des années. C’est dans les bars de ce quartier qu’elle a donné ses premiers concerts.

Vincent Muller

Caroline Alves: retenez ce nom car la signature pop-jazzy, soul et trip-hop de l’artiste romande, originaire de Rio de Janeiro, résonne dans les hautes sphères de l’industrie musicale. Il y a quelques semaines, le vibrato de la Biennoise a ravi les oreilles de dizaines de milliers de personnes à Zurich, alors qu’elle assurait la première partie du phénomène rock Coldplay. Sur les réseaux sociaux, le groupe britannique a d’ailleurs remercié la Suissesse pour sa performance. Une bouteille de champagne accompagnée d’une carte personnelle attendait également la jeune femme de 26 ans dans sa loge. «Le chanteur, Chris Martin, m’a saluée le lendemain. Toute son équipe de production a été extrêmement bienveillante», raconte-t-elle, quelques jours après avoir joué en deux fois devant 90 000 personnes au stade zurichois du Letzigrund. A peine sortie de scène, des centaines de nouveaux fans ont ajouté ses titres à leur playlist. «Il est encore trop tôt pour que j’entrevoie les retombées à long terme. Je me réjouis de découvrir où cette expérience va m’emmener.»

Après les applaudissements du public en liesse, c’est dans le calme des matins de la vieille ville de Bienne que l’auteure-compositrice s’est réveillée. Ici, elle a commencé à faire ses premiers concerts intimistes, il y a plusieurs années déjà. Dans les ruelles, elle a façonné sa voix, inspirée par des légendes comme Nina Simone et Amy Winehouse. De plus grandes dates, comme Festi’neuch et le Gurtenfestival, noircissent petit à petit son agenda quand elle a à peine 20 ans. Elle vient de baptiser son EP, «Unbound». En 2021, en parallèle de ses études en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Neuchâtel, la musicienne devient la première femme et artiste de Suisse romande à remporter le Swiss Music Award en tant que «Best Talent» avec son album «Moonlight», où elle se libère de ses démons intérieurs.

Un avant et un après Coldplay


En février, Caroline Alves avoue avoir été surprise par l’e-mail de l’agence du groupe britannique à la carrière planétaire, qui l’invitait à jouer en ouverture de son concert. Il faut dire que, petite fille, elle apprenait la guitare grâce à un tutoriel de leur tube «Paradise». Mais entre nous, quand on l’écoute et qu’on observe son aisance derrière un micro, il n’y a pas de doute, son talent et son identité sont déjà bien rodés. Quelque chose de particulier émane d’elle. «Quand j’ai reçu une notification sur Instagram qui disait «Coldplay vous a mentionné dans une publication» et que j’ai vu mon nom sur leur tournée, c’est là que j’ai compris que c’était bien réel», confie-t-elle. Curieuse, elle ne peut s’empêcher de chercher à décrypter le processus de sélection. «Finalement, j’ai eu la confirmation que c’est bien Chris Martin qui choisit directement les artistes qui les précèdent. Il m’avait probablement trouvée sur Spotify. J’étais en joie!» 

Après quelques mois d’attente, le fameux week-end de juillet arrive enfin. Au petit matin, place à la gigantissime scène du Letzigrund pour faire le «soundcheck» avec son équipe. En fin d’après-midi, elle chante sept morceaux devant une salle comble. Même scénario le lendemain. «C’était parmi les concerts où je me suis le plus amusée», révèle-t-elle. Une des chansons a particulièrement attiré l’attention du public: «Janeiro», dans laquelle, pour la première fois, elle pose des mots en portugais, sa langue maternelle, sur des rythmes inspirés des favelas, là où elle a grandi jusqu’à ses 11 ans. «De nombreux fans ont cherché le morceau sur internet après le concert mais il n’existe pas encore. Je suis en train de le finaliser en studio avec le producteur neuchâtelois Hook pour le sortir bientôt.»

La musique pour guérir


Hormis l’énergie transmise par la foule, un geste a attiré son attention pendant sa performance. «J’étais émue de voir dans le public des personnes brandir le drapeau brésilien», confie-t-elle en replongeant dans ses souvenirs d’enfance. Son oncle musicien, décédé quelques mois après qu’elle est arrivée en Suisse avec sa maman, à l’âge de 11 ans, l’avait toujours poussée à faire de la musique. Endeuillée, l’adolescente agrippe une guitare et ne la lâche plus. Les paroles remplissent des calepins, comme une thérapie. C’est encore le cas aujourd’hui.

Ce n’est pas un hasard si dans son nouvel EP sorti en juin, «Good Reputation», la chanteuse ose des textes de plus en plus engagés. Caroline Alves parle de thèmes puissants et sensibles, comme le poids de la religion dans l’environnement familial. Elle assume ses compositions inspirées de sa biographie mais ne souhaite pas en dire davantage. «Je n’ai pas envie de tout révéler car dans un titre, par exemple, je ne veux pas critiquer les groupes religieux spécifiquement. Mais pour me retrouver en tant qu’individu, j’ai dû couper les ponts avec une communauté très fermée qui ne validait pas mon choix de carrière», résume-t-elle. A 15 ans, devant un ultimatum, elle s’émancipe pour suivre «[sa] voix».

Et la musique perdure comme échappatoire. Cet été, elle s’évade d’ailleurs pour quelques dates en Suisse alémanique, avant d’organiser la suite de sa tournée. «J’aimerais chanter davantage en Romandie la saison prochaine.» Et son rêve ultime? Se produire un jour à Rio de Janeiro. 

Par Jade Albasini publié le 25 juillet 2023 - 09:33