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Témoignage

Ces propriétaires qui remplacent leurs thuyas par des plantes plus respectueuses de la biodiversité

Plantés à tour de bras dans les années 1980 pour délimiter les jardins, les thuyas sont aujourd'hui devenus indésirables. Témoignages de trois propriétaires romands qui ont remplacé ou envisagent le remplacement de ces haies par des essences locales plus propices à la biodiversité.

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François Sandmeier, Christine Rittener et Caroline Gachet ont remplacé leurs thuyas pas des espèces moins invasives

Christine Rittener, François Sandmeier et Caroline Gachet ont remplacé leurs thuyas pas des espèces moins invasives.

Darrin Vanselow

«Notre nouvelle haie attire plein d’oiseaux»

François Sandmeier

«Il y avait déjà des merles mais, maintenant, il y en a beaucoup plus. Il vient aussi des rouges-gorges, des rouges-queues et toutes sortes de mésanges.» Propriétaire de son logement à Lausanne, François Sandmeier (56 ans) partage une parcelle avec deux copropriétaires. Les trois unités étaient séparées par des haies de thuyas jusqu’en avril 2022. Mais, il y a une année, les quelque 60 mètres de thuyas ont été arrachés et remplacés par une quinzaine d’essences locales différentes. Les travaux ont été subventionnés par la ville de Lausanne. Garde forestier de profession, le Lausannois était enthousiaste à l’idée de troquer les vieux arbres contre de jeunes végétaux du cru. C’est lui qui a pris l’initiative de rallier ses voisins à ce projet.

François Sandmeier

François Sandmeier, Lausanne.

Darrin Vanselow

«Les nouveaux arbres font des fleurs de février à décembre. Les essences ont été choisies de manière à ce que les floraisons se succèdent d’un buisson à l’autre.» Signataire de la Charte des jardins, François Sandmeier s’est ainsi engagé à entretenir cette flore en séparant bien les branches des différentes essences et en rajeunissant les plants, tout en évitant la taille massive. Le quinquagénaire poursuit: «Le seul inconvénient de cette solution, c’est qu’il faut attendre trois ou quatre ans pour que les arbustes deviennent denses. La haie ne protège pas tout de suite les habitants des regards. En hiver, quand les feuilles tombent, elle est moins efficace dans sa fonction de pare-vue.» Quant à elle, la faune se réjouit du changement. «Pour moi, les thuyas sont d’un ton vert cimetière. Ils n’attirent que les araignées. Avec la nouvelle haie, c’est une explosion de couleurs et de vie au printemps. Il arrive des insectes et des vers de terre, puis des oiseaux qui s’en nourrissent et apprécient les baies. On a aussi de petits mammifères comme les hérissons. Il n’y a guère que le renard qui est contrarié, car il ne peut plus se cacher sous les branches basses des thuyas.»


«Longtemps, la taille des thuyas a été l’occasion d’un repas»

Christine Rittener

«Nos thuyas sont vieux et secs. En plus, ils prennent de la place et demandent de l’entretien. Avec mes deux voisins, nous aimerions les faire enlever et les remplacer par des palissades.» Christine Rittener (58 ans) habite à Oron-le-Châtel. Elle occupe un appartement en plain-pied acquis en PPE (propriété par étage) en 1998. «Le lotissement date des années 1990. A l’époque, on plantait partout des haies de thuyas dès qu’il fallait séparer des parcelles ou des terrasses.» 

Cette Vaudoise est mère de trois enfants déjà adultes. «Quand nous sommes arrivés dans cette maison, mes deux filles avaient 7 et 5 ans et mon fils 2 ans.» La terrasse et sa surface herbeuse ont été le décor de quantité de rires et de jeux d’enfants, avec, en fond, la haie de thuyas. Christine Rittener a aujourd’hui trois petits-enfants qui font de premiers pas hésitants à côté des arbustes. «Je profite beaucoup de cet espace», déclare celle qui guette les premiers rayons du soleil printanier pour s’occuper des fleurs de sa rocaille, située en contrebas.

Christine Rittener

Christine Rittener, Oron-le-Châtel.

Darrin Vanselow

«Pendant plusieurs années, la taille annuelle des thuyas a été l’occasion de passer une journée avec les copropriétaires de la PPE et de partager un repas. Nous étudions maintenant les devis pour le remplacement des thuyas. Leur arrachage est un travail compliqué. Il va falloir creuser profondément.» 

Cette habitante du district de Lavaux-Oron a la main verte. Elle poursuit: «Les espaces sont trop petits pour que l’on plante des espèces indigènes pour remplacer les thuyas. Nous allons probablement mettre des palissades en bois ou en PVC. Bien sûr, c’est moins joli qu’une haie végétale mais, en revanche, ça ne demande pas de travail. Pour cacher la paroi, je vais planter des buissons et des fleurs. J’ai grandi ici, à la campagne, et j’ai toujours beaucoup aimé jardiner. J’ai commencé à apprendre dès mon enfance, avec ma maman.»


«J’ai décidé de replanter pendant la crise du covid»

Caroline Gachet

«Pour la haie latérale, j’ai planté un figuier, un troène, un saule pourpre, deux ifs, deux fusains, deux aubépines et une viorne lantane. Devant la terrasse, j’ai mis un gros bac en chêne où j’ai installé une mini-prairie fleurie. J’ai fait les changements il y a deux ans. La flore a déjà bien grandi.» Spécialiste en réinsertion socioprofessionnelle, Caroline Gachet (39 ans) a ressenti le désir de se débarrasser de ses thuyas en 2020, lors du premier confinement lié à la pandémie de covid. «Comme tout le monde, je passais beaucoup de temps à la maison. Mon intérêt pour la nature s’est renforcé, de même que ma conscience écologique. Autour de ma terrasse, je voyais en permanence cette haie de thuyas en monoculture, complètement stérile. La catastrophe, quoi.»

Caroline Gachet

Caroline Gachet, Chailly-Village (VD).

Darrin Vanselow

En octobre 2020, Caroline Gachet prend les choses en main. Quatorze mètres de thuyas sont enlevés, libérant un espace appréciable. «Les arbres étaient devenus énormes: 1 mètre de diamètre pour 1,70 mètre de haut.» La trentenaire privilégie les fleurs mellifères et les arbustes fruitiers, afin que la faune adopte son jardin. Elle a découvert que le terrain offre une très bonne terre, qui retient bien l’eau, et se félicite aujourd’hui de sa décision. «La végétation est devenue magnifique. Je réfléchis à améliorer le choix des fleurs, pour qu’elles éclosent les unes après les autres, tout au long de la belle saison. J’ai un ami qui s’y connaît en jardinage et il me conseille.»

Caroline Gachet a installé une maison à insectes qui s’est aussitôt remplie de locataires. Les invertébrés peuvent trouver un logement dans les tubes de différentes tailles et y pondre leurs œufs. Les larves vont y passer l’hiver au chaud. «L’écosystème a changé du tout au tout à une telle vitesse. Le résultat a dépassé mes espérances. Cet endroit est rendu à la nature. Il y a des lézards et des orvets. J’ai même vu une salamandre et un triton. La Vuachère n’est pas loin. Il s’agit peut-être d’amphibiens qui remontent de la rivière jusqu’à ma terrasse.»

Par Mary Vakaridis publié le 19 mars 2023 - 09:32