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Entre faste et symboles rassembleurs, glamour et antagonismes familiaux, le Royaume-Uni et le monde entier ont vécu, le samedi 6 mai, le sacre du fils aîné d’Elisabeth II et de son épouse en l’abbaye de Westminster. Retour sur une cérémonie d’un autre temps habillée des marqueurs d’aujourd’hui où se dessine l’avenir d’une monarchie souriante et jeune.
Didier Dana
Complices, le roi Charles III, 74 ans, et la reine Camilla, 75 ans, apparaissent pour la première fois en tant que nouveaux monarques au balcon du palais de Buckingham. L’espace d’un instant, ils semblent avoir oublié la foule qui les acclame. Le couple, qui s’est connu dans les années 1970, s’est marié en 2005. Charles avait lancé un ultimatum à la reine Elisabeth: «Ce sera avec Camilla ou sans moi.»
David Niviere/Abacapress/DukasIl y a, pour l’anecdote, Charles III marmonnant son agacement, à l’abri de la pluie, dans son carrosse aux vitres électriques. Le roi est contrarié par le retard de William et Kate. Il y a, pour la grande histoire, l’arrivée du monarque dans l’abbaye de Westminster devant 2300 convives. Un sire sans joie à la mine de bougie fondue, comme si la pierre du destin, bloc de grès de 152 kilos, placée sous son trône de bois, pesait sur ses épaules. On apprendra, le lendemain, de la bouche du prince William que «daddy» avait mal au cou. Douleur psychosomatique, sans doute, au moment de succéder, avec 70 ans d’écart, à la pesante figure de sa mère, la reine Elisabeth II. Pas pratique pour cet homme de 74 ans, sujet aux maux de dos, de porter la couronne de saint Edouard, 2,23 kilos d’or et de pierres précieuses. Le samedi 6 mai, la somptueuse cérémonie de son couronnement oscilla entre l’infiniment petit et le grandiose, le céleste et l’humain. Le très haut et le très bas.
Ainsi vit-on arriver la chanteuse américaine Katy Perry, pimpante, de rose vêtue, faisant des selfies avant l’événement religieux mais toute perdue au moment de trouver sa place. On entendit la flamboyante soprano Pretty Yende, née pendant l’apartheid et première Africaine à chanter lors d’un couronnement. On vit glisser la silhouette sombre du prince Andrew, banni du cercle des «working royals» après des accusations d’agression sexuelle contre une mineure. Au troisième rang, il fut placé au bout du banc. On admira, en pleine lumière, Penny Mordaunt, figure du Parti conservateur, leader de la Chambre des communes, première femme à porter l’épée d’Etat, haute de 1,2 mètre et pesant 3,5 kilos.
Au retour de l’abbaye, pendant la procession de 2 km dite du couronnement, le couple royal, très applaudi, a pris place dans le Gold State Coach, commandé en 1760 par le roi George III. Il est orné des peintures de Giovanni Cipriani. Ce carrosse a été utilisé à l’occasion du sacre de tous les monarques britanniques depuis George IV. Au premier plan, l’attelage est accompagné par les forces armées du Commonwealth et des territoires britanniques d’outre-mer.
Richard Heathcote/Getty ImagesAu retour de l’abbaye, pendant la procession de 2 km dite du couronnement, le couple royal, très applaudi, a pris place dans le Gold State Coach, commandé en 1760 par le roi George III. Il est orné des peintures de Giovanni Cipriani. Ce carrosse a été utilisé à l’occasion du sacre de tous les monarques britanniques depuis George IV. Au premier plan, l’attelage est accompagné par les forces armées du Commonwealth et des territoires britanniques d’outre-mer.
Richard Heathcote/Getty ImagesIl y eut Charles, en chemise, simple mortel, agenouillé, oint à l’abri des regards, et il y eut Camilla, un temps maîtresse honnie, surveillant son souverain du coin de l’œil, esquissant un sourire, puis couronnée à ses côtés. On ne put s’empêcher de penser à leur histoire d’amour et à feu Diana. Elle existait, trace minuscule, dans les boucles d’oreilles de Kate, quadragénaire conquérante, atout star, futur d’une monarchie qui devra se réinventer au-delà de l’étincelant sourire. On s’amusa des facéties de ses enfants. Louis, aussi mignon qu’espiègle, Charlotte, si sage. Et on observa le prince George, page d’honneur appliqué à porter la traîne de son grand-père et, lui aussi, futur roi.
On vit arriver le prince Harry, si seul, à peine débarqué de Los Angeles où il s’est installé il y a trois ans. Il s’avança, courageux, souriant large et le ventre noué. Il assista au sacre de son père devenu son roi, mais repartit promptement afin de célébrer l’anniversaire de son fils, Archie son trésor, atterrissant «on time», à 18 h 30, de l’autre côté de l’Atlantique.
Le duc de Sussex, suppléant, best-seller millionnaire, n’échangea pas un regard avec son frère. L’aîné, monarque en devenir, prêta allégeance au souverain, le gratifiant d’une bise sur la joue, geste dont cette famille royalement dysfonctionnelle s’est montrée bien incapable, en privé, des décennies durant. Au moment où le roi passa devant les siens, on ne vit pas le visage de Harry, cadet exilé. Il était dissimulé derrière la plume rouge du bicorne de la princesse Anne, bombardée, ce jour-là, Gold Stick in Waiting, titre réservé au responsable de la sécurité du souverain. Simple hasard? Les Windsor sont les maîtres d’une visibilité fabriquée. Harry pourrait en faire un chapitre, son pavé est révélateur de ce que signifie, entre rancunes et coups bas, naître dans cette famille-là.
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Dans la nef de l’abbaye, Charles III porte le sceptre à la croix et l’orbe crucigère, globe figurant le monde chrétien. Derrière lui (à g.), en rouge, le prince George, héritier du trône et page d’honneur, tient la traîne de son grand-père. Devant le monarque, Penny Mordaunt, leader de la Chambre des communes, est la première femme à tenir l’épée d’Etat. Le roi se dirige vers la sortie, coiffé, cette fois, de la couronne impériale d’Etat, plus légère. La reine Camilla, elle, est coiffée de la couronne de la reine Mary, créée en 1911.
Ben Birchall/Pa Photos/DukasDans la nef de l’abbaye, Charles III porte le sceptre à la croix et l’orbe crucigère, globe figurant le monde chrétien. Derrière lui (à g.), en rouge, le prince George, héritier du trône et page d’honneur, tient la traîne de son grand-père. Devant le monarque, Penny Mordaunt, leader de la Chambre des communes, est la première femme à tenir l’épée d’Etat. Le roi se dirige vers la sortie, coiffé, cette fois, de la couronne impériale d’Etat, plus légère. La reine Camilla, elle, est coiffée de la couronne de la reine Mary, créée en 1911.
Ben Birchall/Pa Photos/Dukas
Le président de la Confédération, Alain Berset, qualifia la cérémonie de «moment très impressionnant». On s’émut, on frissonna. Les 800 anonymes, citoyens invités, réagirent au diapason, impressionnés par la majesté de cet événement d’un autre temps. On vit passer Olena Zelenska, première dame d’Ukraine. On se souvint que son pays était en guerre. On entendit, au final, un «God Save the King» à vous soulever du sol. On se rappela que Charles III était chef d’Etat et chef des armées. De retour à Buckingham, il esquissa un sourire, face aux militaires qui le saluèrent d’un triple «Hip hip hooray». Peut-être avait-il en tête cette phrase de Sir Winston Churchill, le mentor de sa mère: «Le succès n’est pas final, l’échec n’est pas fatal. C’est le courage de continuer qui compte.»
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De g. à dr.: le duc d’Edimbourg, frère cadet du roi, et à sa gauche son fils James, comte de Wessex, et sa fille, Lady Louise Mountbatten-Windsor; le vice-amiral Sir Timothy Laurence, mari de la princesse Anne, puis Sophie, duchesse d’Edimbourg. A l’arrière-plan, on aperçoit la plume rouge du bicorne de la princesse Anne, en uniforme de colonel des Blues and Royals. Au premier plan, en blanc, la princesse Charlotte et son frère le prince Louis avec leurs parents, Kate et William, princesse et prince de Galles, héritiers directs de la couronne. Les pages d’honneur du roi sont Lord Oliver Cholmondeley, le prince George de Galles, héritier de la couronne après William, son père, Nicholas Barclay et Ralph Tollemache, filleul du roi, qui, à son côté, salue la foule de la main droite. Son épouse, Camilla, reine consort, est accompagnée des pages Gus Lopes (en rouge) et Frederick Parker Bowles (en noir), ses petits-fils, Arthur Elliot (en noir), son petit-neveu, puis, derrière, Annabel Elliot, sœur de Camilla, et Louis Lopes (en rouge), page et petit-fils de la reine Camilla. Fiona Mary Petty-Fitzmaurice, marquise de Lansdowne, est dame d’honneur de la souveraine. Enfin, la princesse Alexandra de Kent, le duc de Kent ainsi que la duchesse et le duc de Gloucester.
David Niviere/Abacapress/DukasLe roi Charles III, 74 ans, recueilli, attend d’être couronné, en l’abbaye de Westminster, à Londres, samedi 6 mai. Il est devenu roi le 8 septembre 2022, à la mort de sa mère, la reine Elisabeth II. Elle fut couronnée, ici même, 70 ans auparavant, le 2 juin 1953. Il dira, pendant la cérémonie religieuse de trois heures, commencée à 11 h 20: «Je viens non pour être servi, mais pour servir.» Une première lors d’un couronnement, marquant une ère nouvelle.
Richard Pohle - WPA Pool/Getty ImagesJustin Welby, l’archevêque de Canterbury, dépose la couronne de saint Edouard, en or massif, sur la tête du souverain. Ornée de 444 pierres précieuses, elle pèse 2,23 kilos. C’est le plus éminent joyau de la monarchie britannique. Créé en 1661, il est conservé à la tour de Londres. Charles III est le 40e monarque couronné en l’abbaye de Westminster.
George Rogers/WPA Pool/SIPA/DukasLe prince William, 40 ans, en grande tenue de l’ordre de la Jarretière, héritier du trône et fils aîné du roi, a prêté allégeance en s’agenouillant. Il a placé ses mains dans celles de son père et lui a dit: «Moi, William, prince de Galles, je vous promets ma loyauté. Foi et vérité je vous porterai. En tant que lige de la vérité et de l’intégrité physique. Que Dieu me vienne en aide.» Il a ensuite embrassé le roi sur la joue. Charles III a murmuré, ému: «Merci William!»
Yui Mok/WPA Pool/Getty ImagesCharles III a été oint à l’abri des regards puis couronné. Il a revêtu la «supertunica» de soie et d’or et il est assis au cœur de Westminster sur le trône en chêne vieux de 700 ans, commandé par le roi Edouard Ier, dans lequel a été placée la lourde pierre du destin qui servait à couronner les rois écossais. Le siège est posé près du maître-autel de l’abbaye, sur le pavé Cosmati, une mosaïque du XIIIe siècle. Dans sa main droite gantée de blanc, symbole de pureté et d’intégrité, le roi porte le sceptre à la croix, signe du pouvoir de la royauté et de la justice, surmonté du Cullinan I, le plus gros diamant taillé du monde. Dans sa main gauche, il tient le sceptre à la colombe, symbolisant le Saint-Esprit et la miséricorde.
Aaron Chown/WPA Pool/Getty ImagesDans la nef de l’abbaye, Charles III porte le sceptre à la croix et l’orbe crucigère, globe figurant le monde chrétien. Derrière lui (à g.), en rouge, le prince George, héritier du trône et page d’honneur, tient la traîne de son grand-père. Devant le monarque, Penny Mordaunt, leader de la Chambre des communes, est la première femme à tenir l’épée d’Etat. Le roi se dirige vers la sortie, coiffé, cette fois, de la couronne impériale d’Etat, plus légère. La reine Camilla, elle, est coiffée de la couronne de la reine Mary, créée en 1911.
Ben Birchall/Pa Photos/DukasComplices, le roi Charles III, 74 ans, et la reine Camilla, 75 ans, apparaissent pour la première fois en tant que nouveaux monarques au balcon du palais de Buckingham. L’espace d’un instant, ils semblent avoir oublié la foule qui les acclame. Le couple, qui s’est connu dans les années 1970, s’est marié en 2005. Charles avait lancé un ultimatum à la reine Elisabeth: «Ce sera avec Camilla ou sans moi.»
Leon Neal/Getty ImagesAu retour de l’abbaye, pendant la procession de 2 km dite du couronnement, le couple royal, très applaudi, a pris place dans le Gold State Coach, commandé en 1760 par le roi George III. Il est orné des peintures de Giovanni Cipriani. Ce carrosse a été utilisé à l’occasion du sacre de tous les monarques britanniques depuis George IV. Au premier plan, l’attelage est accompagné par les forces armées du Commonwealth et des territoires britanniques d’outre-mer.
Richard Heathcote/Getty ImagesAu balcon de Buckingham, le prince George (2e depuis la g.), très appliqué pendant la cérémonie, se lâche un peu en compagnie de ses trois amis pages d’honneur, comme lui, du roi Charles III. L’héritier du trône fêtera ses 10 ans le 22 juillet. Selon William, son père, son fils aîné a développé des goûts musicaux très rock. A la maison, il aime écouter AC/DC et Led Zeppelin, a révélé le prince de Galles au lendemain du couronnement.
George Rogers/SIPA/DukasCharlotte de Galles, 8 ans, et Louis, 5 ans, les jolis cadets de Kate et William, complémentaires et complices, ont attiré les regards. La première, très sage, s’amuse des pitreries de son jeune frère, intrigué par un détail de la cérémonie dans l’imposante abbaye de Westminster.
Yui Mok/WPA Pool/Getty ImagesLouis aime crier et grimacer au passage de la parade des avions au-dessus de Buckingham Palace. Désormais, Kate, sa maman, en rigole. Samedi, la princesse de Galles, très en beauté en grande tenue de l’ordre royal de Victoria, arborait des boucles d’oreilles ayant appartenu à feu sa belle-mère, Diana, fabriquées pour son mariage. Elle est coiffée, comme Charlotte, sa fille, d’une couronne florale en argent et en cristal.
Leon Neal/Getty ImagesLe prince Harry, duc de Sussex, venu de Los Angeles, était souriant. Il portait, alignées, sa médaille de guerre d’Afghanistan et trois décorations des jubilés d’or, de diamant et de platine ainsi que l’étoile de chevalier commandeur de l’ordre royal de Victoria décernée par la reine Elisabeth II. A droite, Edoardo Mapelli Mozzi, époux de Beatrice, cousine de Harry.
Toby Melville - WPA Pool/Getty ImagesLe roi Felipe et la reine Letizia d’Espagne.
Pool/Shutterstock/DukasL’actrice Emma Thompson, reine du cool, en manteau rouge à motifs floraux.
Jeff Spicer/Getty ImagesLe rockeur et romancier australien Nick Cave.
i-Images/Polaris/DukasJill Biden, l’épouse du président américain, est venue avec sa petite-fille, Finnegan.
Dan Charity - WPA Pool/Getty ImagesOlena Zelenska, première dame d’Ukraine, et le premier ministre ukrainien, Denys Chmyhal.
Andrew Milligan/DukasKaty Perry, en rose, ose un selfie dans l’abbaye de Westminster. Dimanche dernier, elle a chanté devant le château de Windsor pour fêter les monarques.
Gareth Cattermole/Getty ImagesLe prince Albert de Monaco et son épouse, Charlène Wittstock.
Andrew Matthews - WPA Pool/Getty ImagesLe président de la Confédération, Alain Berset, et son épouse, Muriel Zeender Berset.
Samir Hussein/WireImage/Getty Images