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Société

Cinq stars, cinq juniors, une passion commune

Ces cinq personnalités romandes brillent dans les médias, sur les pistes de ski, dans le ciel, sur scène ou en studio. Lorsque les lumières des projecteurs s’éteignent, elles donnent un peu de leur temps, de leur visibilité ou partagent expériences et conseils avec des jeunes qui tracent leur propre voie. Rencontre avec cinq binômes inspirés et inspirants.

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«Quand Jérôme a voulu faire de la compétition, j'ai ajouté un nouveau volet à la fondation afin de soutenir les jeunes athlètes», Géraldine Fasnacht.

David Marchon

 

Jérôme Caroli & Géraldine Fasnacht
«Plus qu’une mentor, Géraldine est devenue une amie»
 

La femme-oiseau a pris un jeune rider du Châble sous son aile.

«Les plus grandes qualités de Géraldine? Sa détermination et sa générosité.» C’est à bord d’une petite capsule suspendue dans les airs que Jérôme Caroli, rider de 25 ans, engagé en Coupe du monde de VTT de descente, répond à nos questions. «Je pourrais en citer d’autres, mais il faut qu’on change de télécabine.» Géraldine Fasnacht, tout sourire, nous rejoint à l’arrêt. Direction le domaine skiable de La Chaux, situé sur les hauts de Verbier. Sous nos yeux défile un panorama qui ne cesse d’émerveiller celle qui y a élu domicile il y a plus de vingt ans. «On a une chance folle de vivre ici. C’est un paradis, un terrain de jeu fabuleux pour les amateurs de ski et de snowboard freeride, de VTT, de randonnée, de parapente ou encore de wingsuit.»

Pourtant, au début des années 2000, la sportive et son mari, le guide de montagne Sébastien Gay, s’étonnent du peu d’activités proposées aux enfants de la région. Du ski alpin en hiver et du football en été. «Il m’a dit: «C’est fou, il y a des montagnes partout mais aucune structure pour emmener grimper les jeunes», se souvient la triple vainqueur de l’Xtreme de Verbier. Ils décident d’y remédier. Au volant de leur bus VW, ils font le tour des villages de la vallée, récupèrent les enfants et les emmènent grimper tous les mercredis après-midi. La quadragénaire explique la démarche: «Le but n’était pas de créer un berceau de champions, mais de faire découvrir de super spots de grimpe aux enfants du coin et surtout de leur donner accès à cette activité. Ce n’est pas parce que tu grandis dans la vallée que tu as forcément un papa ou une maman guide de montagne.»

Jérôme Caroli fait partie du groupe d’«apprentis grimpeurs». Un premier lien se tisse avec la freerideuse au cours des camps d’été auxquels il participe. A 12 ans, pour s’offrir son premier VTT de descente, il travaille les mercredis après-midi dans un magasin de sport. Il confie modestement: «Je ne viens pas d’une famille aisée, mon père est décédé quand j’avais 6 ans. Je peux vous dire que j’ai savouré ce premier vélo!» Il commence les compétitions rapidement. Les week-ends, vélo sous le bras et tente de camping sur le dos, il part seul en train rejoindre les spots de compétition. «Les parents des copains les emmenaient, le papa faisait de la mécanique, etc. J’étais tout seul. J’avais des amis, évidemment, mais ça m’a forgé le caractère. J’ai dû bosser pour en arriver où j’en suis aujourd’hui.» Il poursuit: «Les sportifs de la vallée m’ont pris sous leur aile alors que je n’étais qu’un ado. «Jay» a aussi fait beaucoup pour moi.»

Elle l’emmène parfois sur les pistes de freeride sécurisées du domaine skiable de Verbier. Il se marre: «Je portais des pantalons de femme, elle me prêtait les siens.» La jeune maman sourit: «Il s’en fichait d’être à la mode. Son bonheur, c’était d’aller rider.» Le sportif du Châble concède: «Je n’avais pas le niveau, ni l’expérience pour les suivre. Quand on connaît le milieu, on sait que les journées de poudre sont précieuses. On a plutôt envie de les faire avec des copains qui avancent. C’était super qu’elle me prenne de temps en temps avec elle.» Géraldine Fasnacht lui apporte également un soutien financier, grâce à sa fondation Mountain Line. «Quand il a commencé à vouloir faire de la compétition en ski et en bike, j’ai ajouté un nouveau volet à la fondation afin de soutenir les jeunes athlètes. On offrait les frais d’inscription, les déplacements ou encore du matériel», relate la femme-oiseau.» Elle l’aide aussi à ficeler ses dossiers de sponsoring, lui donne des contacts et des conseils pour gérer sa carrière. Aujourd’hui, Jérôme Caroli vole de ses propres ailes mais demeure extrêmement reconnaissant: «On a traversé des moments difficiles tous les deux. J’ai eu de la chance de l’avoir à mes côtés, ainsi que ma mère et mes amis. Plus qu’une mentor, c’est devenu une amie.»

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«Il a été là pour moi quand j’ai sombré dans la dépression. Il était là aussi quand ça allait mieux. C’est beau de partager ces moments», Stress.

David Marchon

Gabriel Spahni & Stress
«Quand j’étais ado, sa vie me faisait rêver»
 

Un lien fort et intime s’est tissé entre le bassiste de Pegasus et le rappeur.

C’est l’histoire d’un parrainage mutuel, d’une amitié un peu improbable née d’une collaboration artistique et des tourments traversés par les deux musiciens.
Gabriel Spahni, originaire de Bienne, est le bassiste de Pegasus. Si ce nom est méconnu de ce côté de la Sarine, le groupe n’est rien de moins que l’un des plus gros vendeurs de disques du pays. Menée par le chanteur Noah Veraguth, la formation a remporté de nombreux Swiss Music Awards et écume les grandes scènes nationales et internationales avec sa pop mélodique et lisse, destinée à un large public. Un univers a priori à mille lieues des sons urbains de Stress. Le rappeur de 44 ans, qui a grandi à Lucens (VD), se souvient, amusé: «Leur manager est passé au studio et a insisté pour que j’écoute leurs morceaux. Il me saoulait avec ces gars, qui avaient un nom – Pegasus – à coucher dehors! Finalement, j’ai écouté et, ma foi, j’ai été très impressionné par la qualité de leur travail. J’ai entamé une collaboration avec leur chanteur, Noah.»

En 2014, Stress leur rend visite à Londres, où Gabriel Spahni et Noah Veraguth se sont installés. Ils écrivent des chansons, bidouillent des sons ensemble. L’ébauche d’une future collaboration se dessine. Stress relate: «Gabriel nous a montré ce qu’il faisait. Il avait produit quelques sons de son côté. J’ai assez rapidement deviné son potentiel.» De retour en Suisse, le rappeur invite le bassiste chez lui, en banlieue zurichoise, avec l’envie de produire sa propre musique. Un exercice nouveau pour tous les deux. «On était franchement nuls au début, admet Stress dans un grand éclat de rire. Mais nous étions prêts à investir des heures et des heures de travail. Ça nous a permis de progresser, d’apprendre et de développer ce qu’on recherchait.» «J’étais un peu intimidé. Il ne le sait pas mais j’ai toujours voulu bosser avec lui. Quand j’étais ado, j’écoutais ses chansons à la radio, sa vie me faisait rêver. Il a été une source d’inspiration pour moi», révèle timidement le Biennois de 32 ans.

S’ils partagent la même éthique du travail, on doit leur rapprochement à des éléments plus personnels. «Notre vie était plutôt chaotique quand on s’est rencontrés. J’étais en colère contre le monde entier. Ma carrière dans la musique marchait bien mais je sentais qu’il fallait que je me renouvelle. J’ai dû briser certains schémas, repenser qui j’étais, me réinventer pour me reconstruire différemment», confie Gabriel Spahni. «Il buvait jusqu’à plus soif, je fumais joint sur joint. C’était une période sombre», confesse le rappeur.

Pour sortir la tête de l’eau, ils se jettent à corps perdu dans le travail. En 2017, un premier projet voit le jour, Trust, en compagnie de la chanteuse Evelinn Trouble. Puis un deuxième, «Sincèrement», le dernier opus de Stress, en 2019. Une collaboration féconde dont les contours ne se limitent pas à la sphère artistique. «Il a été là pour moi quand j’ai sombré dans la dépression. Il était là aussi quand ça allait mieux. C’est beau de partager ces moments, ce chemin. Ça m’a donné la niaque, l’envie d’entreprendre des choses et de les faire bien.» Le bassiste de Pegasus ajoute: «On s’est plantés un nombre incalculable de fois. Mais vient un moment où tu écoutes ce que tu viens de faire et que tu réalises que ce n’est pas si nul. Cela te remet en mouvement, te donne un élan et l’envie de continuer, et c’est ça qui a fait la différence. De trouver du positif dans cette période de m…»

Ils achèvent aujourd’hui leur troisième projet, le nouvel album de Stress, dont la sortie est prévue pour le début de l’année prochaine. Un chemin semé d’embûches qui a donné naissance à une solide amitié. «Je respecte sa façon de penser. Il me permet de me remettre en question. C’est la richesse d’une relation. C’est super beau pour moi, comme ça l’est pour lui. L’an prochain, il va se marier. Assister à son évolution, à la transformation d’une personne, c’est précieux et ça me donne envie de faire partie de sa vie», conclut le rappeur.

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«J’étais venu soutenir la grève des salariés à Yverdon. J’ai suivi le discours de Nicole et j’ai été très impressionné», Pierre-Yves Maillard.

David Marchon

Nicole Vassalli & Pierre-Yves Maillard
«Ce que j’admire le plus? Son envie de lutter»
 

La secrétaire syndicale d’Unia Vaud suit avec le même punch la voie pavée par le boss de l’USS.

Le lieu du rendez-vous est tout trouvé. Ce sera à Yverdon, devant les locaux vides de Leclanché Capacitors, une entreprise centenaire spécialisée dans la fabrication de condensateurs. En octobre 2020, les salariés font grève pour protester contre la fermeture de l’entreprise. A leurs côtés, la secrétaire syndicale d’Unia Vaud, Nicole Vassalli. Sur une petite estrade, micro en main, elle réclame l’annulation du plan de délocalisation. Pierre-Yves Maillard se souvient: «Malgré le confinement et l’interdiction de manifester, j’ai été très impressionné de voir que dans le Nord vaudois il y avait une bagarre! Je suis venu soutenir la grève. J’ai suivi le discours que Nicole tenait devant les salariés. Un beau speech! Quand vous m’avez appelé pour cet article, j’ai immédiatement pensé à elle. Je souhaitais présenter cette relève syndicale.»

Leur rencontre est récente. En 2017, Nicole Vassalli, fraîchement diplômée de l’EPFL, travaille comme chimiste chez Thermo Fisher, une société américaine spécialisée dans les instruments de mesure de précision. La direction de l’entreprise annonce une délocalisation du travail ainsi que la suppression d’une centaine de postes. La venue de Pierre-Yves Maillard, alors conseiller d’Etat, est annoncée. Elle confesse: «D’origine tessinoise, focalisée sur mes recherches scientifiques, je ne le connaissais pas mais j’ai compris à travers la réaction de mes collègues que sa présence était importante.» Il remarque la jeune femme, seule représentante féminine au sein de la commission du personnel. «Elle a été très courageuse. Le résultat obtenu par les salariés et Unia dans la négociation du plan social est remarquable. Ça, c’est du travail syndical de base!»

Cette expérience marque le début de l’engagement de la Tessinoise. Elle quitte Thermo Fisher et rejoint Unia Vaud en tant que secrétaire syndicale. La fonction est belle mais comporte passablement de hauts et de bas. «Nous sommes toujours dans la gestion du conflit, qu’il soit individuel ou collectif, entre la partie patronale et la partie des travailleurs. Il y a de jolies victoires, mais il y a aussi des défaites. Il est important de garder en tête le positif.» Si elle admire le parcours du grand patron de l’Union syndicale suisse (USS), elle est plus réservée sur sa carrière politique: «La politique comporte beaucoup de compromis. Pour l’instant, je n’ai aucune ambition de ce type-là. Je préfère me concentrer sur mon rôle de syndicaliste. Mais il a une énergie formidable! Ce que j’admire le plus? Son envie de lutter. Il aurait pu arrêter après son parcours politique, mais il est toujours là. Et à fond! Il est très déterminé et je pense que nous avons ça en commun. Quand j’ai un objectif, je mets tout en œuvre pour l’atteindre. On arrive toujours à quelque chose si on s’organise.»

La Tessinoise suit la voie pavée par son aîné tout en affichant sa volonté de transfigurer et de moderniser le mouvement. Les défis sont nombreux: le climat, l’égalité salariale, le congé parental et la mobilisation des jeunes. Elle concède: «On n’a pas encore trouvé la clé, mais je suis sûre qu’en revitalisant les syndicats, on donnera l’envie aux plus jeunes de s’engager.» Pierre-Yves Maillard ajoute: «C’est en cela que le parcours de Nicole est exemplaire. Elle a compris que, pour que la lutte soit efficace, il fallait s’organiser et inscrire l’action dans la continuité.»
L’entretien arrive à son terme et Pierre-Yves Maillard demande à la jeune femme si elle va au bureau d’Unia. Non, elle file en zone industrielle. Une entreprise de la région yverdonnoise vient de déposer le bilan. La lutte continue.

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«Tobias a la tête sur les épaules. Il est motivé et épanoui et ça peut l’amener loin», Didier Défago.

David Marchon

Tobias Donnet & Didier Défago
«Bénéficier de ses conseils est une grande chance»
 

Après avoir suivi la trace de son parrain champion, le jeune sportif bifurque sur le ski-alpinisme.

Nous les rencontrons à Morgins, où ils résident tous les deux. Tobias Donnet pointe du doigt des bâtiments: «C’est ici que j’ai appris à skier. Principalement avec mon père, mais aussi avec Didier. J’avais 2 ans. J’ai encore des photos à la maison de ces moments. La piste s’appelait le Jardin des Neiges. Ils ont construit depuis.» Les deux skieurs se connaissent depuis toujours, et pour cause, le champion olympique de descente aux Jeux de Vancouver est le parrain de Tobias.

Le natif de Troistorrents suit les exploits de son illustre aîné à la télévision et commence les compétitions de ski alpin dès son plus jeune âge. Didier Défago lui donne des conseils, assiste à quelques courses et lui offre du matériel. Tobias Donnet se marre: «Chaque année, il arrivait à la maison en voiture avec le coffre rempli de skis neufs. On partait ensuite sur les glaciers pour tester tout ça. Ça me faisait tellement plaisir!»

Pourtant, à 14 ans, il troque ses lattes de ski alpin contre celles plus légères et plus courtes de ski-alpinisme. Pour quelle raison? «Je n’avais plus la même motivation à l’entraînement, même si les résultats commençaient à venir. J’adorais la course à pied et le ski-alpinisme, des sports d’endurance. Je me suis dit que si je voulais réaliser quelque chose dans le sport, c’était le dernier moment pour changer de discipline», répond le jeune homme de presque 20 ans. Une décision mûrement réfléchie, acceptée avec le temps par le Morginois de 45 ans: «Evidemment, j’ai eu un petit pincement au cœur lorsqu’il me l’a annoncé. J’admets qu’au début j’avais envie qu’il suive la voie de mon sport avec l’espoir que mon coup de main ferait la différence. De soulager aussi un peu l’investissement des parents. Mais si j’ai pu l’accompagner dans une direction, tant mieux. Il a légèrement bifurqué, mais c’est magnifique de le voir épanoui aujourd’hui.»

L’ascension est rapide et les succès s’enchaînent pour l’espoir du ski-alpinisme. Une sélection en équipe valaisanne, puis en équipe de Suisse. Un titre de champion du monde avec l’équipe nationale relève mixte et un premier podium de Coupe du monde en 2021. La saison prochaine, il passera «chez les grands», en U23. Trois ans pour engranger de l’expérience avant de rejoindre l’élite et, qui sait, peut-être une sélection aux Jeux olympiques de Milan en 2026. «C’est une motivation supplémentaire. Quand Didier est devenu champion olympique, on a sauté dans la voiture avec mes parents pour aller fêter ça à Morgins malgré le décalage horaire. On est également allés l’accueillir à l’aéroport. C’était fou! Je fais du sport pour vivre ces émotions.»

Toutefois, malgré les excellents résultats, il n’est pas aisé de gagner sa vie en pratiquant exclusivement du ski-alpinisme en Suisse, une discipline moins médiatisée et encadrée que le ski alpin. Tobias Donnet confie: «A la fin de mon apprentissage, je suis allé manger chez Didier pour lui demander des conseils. Ça a été une chance de pouvoir me tourner vers une personne qui a cette expérience, car c’était une phase de transition délicate pour moi. L’idée est de garder un pied dans le monde du travail avec l’espoir que, après quelques années, je pourrai diminuer mon taux d’activité et vivre de ma passion.» Didier Défago précise: «Les revenus sont très aléatoires dans ce domaine. Ces vingt dernières années, le gain a été axé sur la performance. Il y a forcément une part de risque quand on envisage ce chemin.» Il poursuit, confiant: «Tobias a la tête sur les épaules. La maturité est là, il sait exactement où il veut aller. Il est motivé et épanoui. Ça peut l’amener loin.»

Aujourd’hui, Didier Défago suit la progression de son filleul de loin. Toujours en vadrouille l’un et l’autre, ils ont rarement le temps de partager un moment ensemble. A la fin de l’interview, Tobias lance à son parrain: «Tu es dans le coin samedi? Je vais reconnaître le SwissPeaks Marathon: 45 bornes, tout doux, juste pour me rendre compte des passages. Ça te dit?» «OK, je fais un bout avec toi!»

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«Quand je l’ai rencontré, il connaissait mieux les chorégraphies que moi. Je les avais oubliées. Pour moi, Eduardo nous montre comment être heureux», Sonia Grimm.

David Marchon

Sonia Grimm et Eduardo
«Mon fils a pu survivre grâce à Sonia»
 

Atteint d’une maladie orpheline, le jeune homme est fan de la chanteuse. Un lien magique.

Eduardo a les yeux qui brillent. «Sa Sonia» se tient là, face à lui. Dans quelques minutes, il prendra la pose à ses côtés, dans le studio d’enregistrement de son idole. Il a revêtu une chemise blanche et un gilet noir pour l’occasion. La chanteuse porte une robe estivale, malgré les trombes d’eau qui se déversent sur la Suisse romande en ce mois d’août.

Ils se sont rencontrés quand il était tout petit. Il venait assister aux représentations accompagné de sa marraine, Sandrine, dont la fille participait aux spectacles. Quand Eduardo aperçoit Sonia Grimm pour la première fois, coup de foudre. Eduardo mime une explosion avec ses mains: «C’était magique!» Il l’attend à la fin des spectacles pour obtenir une dédicace. Le lien se tisse petit à petit. Il assiste à une répétition générale, découvre les coulisses. Il revient chaque année. «Il a un accès privilégié depuis qu’il est tout petit. J’ai pu le voir grandir», précise la quadragénaire vaudoise.

Atteint d’une maladie orpheline, Eduardo ne parle pas jusqu’à l’âge de 5 ans. Angela, sa maman, explique: «On savait qu’il pouvait développer des sons et des aptitudes grâce à la musique. Les chansons de Sonia m’ont immédiatement plu, claires, s’adressant à des enfants et porteuses de jolis messages. Je savais qu’Eduardo y serait sensible.» Cet enfant lumineux grandit un peu à part, à l’écart de ses camarades d’école qui peinent à accepter sa différence. Il se réfugie dans le monde féerique de la chanteuse pour enfants, peuplé de créatures et de personnages fantastiques. Il y puise sa joie de vivre et sa force pour traverser les épreuves qui jalonnent son existence. Emue, Angela se remémore un épisode difficile: «Mon fils venait de se faire opérer des amygdales. Il souhaitait aller voir le spectacle de Sonia, nous y sommes allés à quinze. Il n’était pas bien ce jour-là mais il n’a rien dit. La nuit, il a eu une hémorragie des amygdales et a été transféré aux soins intensifs. Le lendemain, sa marraine lui a apporté un petit lecteur de CD. Il a écouté en boucle les disques de Sonia pendant quatre jours. Il a survécu grâce à elle.»

L’an passé, Sonia Grimm reçoit un coup de téléphone d’Etoile filante, une fondation qui permet de réaliser les rêves d’enfants en situation de handicap. Elle propose qu’il enregistre un disque à ses côtés, spécialement pour lui. Durant une matinée, l’adolescent pose sa voix sur «Je l’ai vu», «Un drôle de Noël» ou «Le roi des grincheux». Des paroles qu’il connaît par cœur. Elle découvre le talent de danseur d’Eduardo. «Il connaissait mieux les chorégraphies que moi, je les avais oubliées!» s’amuse la Vaudoise. Un moment inoubliable pour le garçon et sa famille. «Sa situation médicale est délicate, nous sommes toujours dans la crainte de mauvaises nouvelles. Cette expérience nous a emmenés dans une autre dimension. Nous avons vécu du positif, je me suis sentie bien durant le mois qui a suivi. J’espère que l’association se rend compte de la force qu’elle nous a offerte. Une accalmie bienvenue», confie la maman du jeune homme. Un bonheur aussi pour la chanteuse, heureuse de pouvoir offrir cette expérience à Eduardo. «C’est fou ce qu’on apprend en le côtoyant. On mène nos vies à 100 à l’heure, à courir après je ne sais quoi. Lui, il vit à fond chaque instant, dans une joie totale, sans arrière-pensée. Il rayonne. C’est un enseignement précieux. Il nous montre comment être heureux.»

Pour Eduardo, un deuxième rêve est sur le point d’être réalisé. Celui d’avoir sa photographie dans un journal. Cerise sur le gâteau, ce sera avec Sonia Grimm!

Par Alessia Barbezat publié le 12 novembre 2021 - 08:55