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Le dilemme du voyageur: annuler ou attendre?

Renoncer à partir en vacances à cause du coronavirus ou maintenir ses projets, voilà la question qui en trouble plus d’un en ce moment. L’ombudsman des agences de voyage, Franco Muff, sait quand il convient de jouer sa chance.

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C’est une décision difficile, voire impossible à prendre et nombreux sont les voyageurs à y être confrontés en ces temps de pandémie: annuler et en rester pour ses frais, ou attendre en espérant que le voyagiste annule de lui-même à la dernière minute?

Antoine Steiner* s’est retrouvé dans cette situation. Il avait réservé une croisière en Méditerranée pour début avril. L’organisateur maintient le voyage, rien n’est annulé, et l’assurance annulation ne prend rien en charge. C’est donc à lui de décider. S’il annule aujourd’hui, il a encore droit au remboursement de 40% du prix du voyage, aux termes des conditions contractuelles. Le solde sera perdu pour lui. S’il attend encore, le montant du remboursement continuera à diminuer progressivement.

Et s’il annule sa réservation, et que l’organisateur du voyage finit par annuler lui aussi le voyage et rembourser la totalité du prix? Simple manque de chance, d’avoir annulé sa réservation peu de temps avant alors que d’autres voyageurs récupèrent tout leur argent?

Incertitudes et frontières fermées

L’ombudsman des agences de voyages reçoit énormément de demandes à ce sujet. «Mes collaboratrices et moi allons être submergés », prédit Franco Muff. Les horaires s’allongent dans le secteur des voyages. L’homme n’est pas très heureux de la manière d’informer de la Confédération: «Les dernières décisions venues de Berne, notamment celle de soumettre les manifestations de plus de 150 personnes à autorisation, m’ont rendu un peu sceptique. Jusqu’ici, l’information du gouvernement était bien gérée mais aujourd’hui, elle suscite de l’incertitude et de l’inquiétude. On le voit dans notre branche.» Pour lui, il ne fait pas de doute que si la menace sanitaire dure, il faut s’attendre à des conséquences économiques considérables pour les voyagistes et les agences de voyages.

De nombreux doutes vont subsister dans le domaine du voyage, s’inquiète l’ombudsman de la branche. Il déconseille formellement à la clientèle d’annuler trop tôt. «Si vous avez réservé un séjour à Barcelone pour le mois de juin, vous pouvez tranquillement attendre de voir comment la situation évolue. Il vaut la peine d’examiner les conditions contractuelles pour savoir jusqu’à quand il est possible d’annuler sans frais. Et dès l’instant où l’annulation devient payante, de se reposer la question: annuler ou attendre? Combien cela va-t-il me coûter suivant à quel moment j’annule?»

Il est normal de se préoccuper de la question. Malgré tout, il faudra compter avec des frais d’annulation, sauf en cas d’interdiction d’entrée dans certains pays: «Dans ce cas, on peut partir du principe que le client n’aura pas de frais autres que la taxe de réservation.» Israël, par exemple, a fermé ses frontières aux touristes arrivant. Ces derniers ne sont autorisé à pénétrer sur territoire israélien que s’ils peuvent rester deux semaines en quarantaine chez une personne de contact. Peu de voyageurs sont en mesure de remplir ces conditions, estime Franco Muff: «Combien de citoyens suisses ont de la famille en Israël disposée à les héberger 15 jours? Qui a des vacances assez longues pour en profiter encore après ce délai?» Dans ces situations, le client devrait être remboursé, selon l’ombudsman.

Pas de mises en garde spécifiques par pays

Le même constat vaut pour les Etats-Unis d’Amérique, relève Franco Muff. Depuis le 13 mars à minuit (heure locale), il est temporairement interdit aux étrangers en provenance d’Europe d’entrer sur le territoire. Il y aura des exceptions pour les citoyens et résidents états-uniens et les voyageurs arrivant de Grande-Bretagne. Du fait qu’il est totalement impossible de se rendre aux USA, Franco Muff pense que les consommateurs se verront rembourser les frais des prestations réservées. Les organisateurs et agents de voyages ont également la possibilité, pour les arrangements forfaitaires, de convenir d’un report de dates ou d’offrir des bons.

Mais qu’en est-il de l’Italie, où aucune interdiction d’entrée n’a été décrétée, alors que le pays tout entier est en confinement? Dans un article du Tages-Anzeiger, on nous dit que la Confédération à décidé de ne plus émettre de mises en garde spécifiques par pays en relation avec le coronavirus, donc pas pour l’Italie non plus. Or, de nombreuses assurances de voyage n’entreront en vigueur qu’à partir du moment où la Confédération aura publié de telles mises en garde. Faut-il alors agir de la même manière pour l’Italie que pour Israël? Franco Muff: «Il y a une différence flagrante: «On a encore le droit de se rendre en Italie, bien que cela n’ait aucun sens par les temps qui courent.» Autrement dit, le comportement actuel de la Confédération fait que le voyageur ne reverra pas son argent, à moins d’avoir annulé sa réservation de lui-même dans les délais, ou que le voyagiste ait supprimé l’offre. «C’est regrettable. Cela désavantage nettement le consommateur», regrette l’ombudsman.

Prudence pour les croisières

A quelques jours du début d’une croisière, la décision devient difficile à prendre, explique Franco Muff. Il prévoit bien que certains voyagistes annuleront leurs croisières mais on ne peut pas en avoir l’assurance. «Pour des vacances à prix modeste, où la probabilité d’annulation par l’organisateur est grande, je tenterais ma chance et j’attendrais – pour autant qu’on ait encore envie de partir. Mais si le client résilie le contrat de réservation juste avant que le voyage soit annulé par l’organisateur, ce n’est vraiment pas de chance.»

S’agissant de voyages plus coûteux, il convient d’évaluer le risque avec soin. Pour une croisière comme celle qu’Antoine Steiner* avait prévue, l’ombudsman recommande la plus grande circonspection: «Dans ces cas-là, en tant que consommateur, je jouerais la prudence. J’annulerais plus vite. L’expérience récente montre que pour les grandes croisières, au Japon, par exemple, la situation est imprévisible. D’aucuns ont fini coincés sur un paquebot. Dans d’autres types de voyages, on arrive plus facilement à éviter de se retrouver mal pris.»

Les voyagistes repoussent-ils le moment d’annuler, comptant sur les clients pour renoncer de leur côté et payer les frais contractuels? Franco Muff ne le pense pas: «A ma connaissance, ils ne jouent pas à ce jeu. Ils sont certainement attentifs à déconseiller à leurs clients d’annuler sans avoir bien réfléchi.»

* Nom d’emprunt


>> Davantage d’infos au sujet des assurances de voyage sur mesdroits.ch, conseiller juridique numérique de L'illustré: si vous prévoyez un séjour à l’étranger d’une certaine durée, ou si vous voyagez souvent, vous serez forcément confronté à la question du choix d’une assurance voyage. Mesdroits.ch renseigne notamment les abonnés de L'illustré sur l’intérêt d’une assurance contre les frais d’annulation et sur la couverture offerte par un livret ETI.


Par Tina Berg (Beobachter) publié le 1 avril 2020 - 11:47, modifié 18 janvier 2021 - 21:09