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expérience de mort imminente

Ils sont allés aux frontières de la mort

On les appelle «expérienceurs». Parce qu’ils ont vécu une expérience de mort imminente, baptisée EMI ou NDE en anglais. Un phénomène qui n’est plus rangé dans le paranormal et qui est désormais étudié par de nombreux chercheurs. Nos trois témoins en sont persuadés: ils n’ont pas souffert d’hallucinations!

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Miggy

Agée de 74, Miggy Mavrommatis a vécu plusieurs expériences de mort imminente au cours de sa vie. 

Julie de Tribolet

Première publication le 17 juin 2021

Si la plupart des témoignages font état de NDE positives, il arrive aussi, mais moins fréquemment heureusement, que la personne vive une expérience de mort imminente négative, qui va engendrer un traumatisme. Décrite comme une plongée dans un néant, un vide terrifiant assorti d’un sentiment parfois de culpabilité. D’où l’importance, dit encore le psychologue Jonathan Matile, spécialiste de ce phénomène, de bien se préparer à sa mort, notamment pour les personnes en fin de vie, afin de partir en paix et sans culpabilité pour avoir le passage le plus serein possible. Témoignages.

«J’ai ressenti un amour indéfinissable»

Ivan Decarli, 53 ans, Genève, a vécu une NDE dans l’ambulance qui le conduisait à l’hôpital
Personnes ayant fait une expérience de mort imminente (NDE). ici Ivan à Genève

«C’est comme si ma fréquence vibratoire avait changé»

Julie de Tribolet

C’était il y a six ans, Ivan était en formation professionnelle, quand il s’écroule, victime d’un malaise cardiaque. «C’était comme un coup de poignard dans la poitrine», dit-il. Il perd connaissance dans l’ambulance. «J’ai senti tout à coup que je sortais de mon corps, je n’avais plus aucune douleur, j’ai tout de suite aperçu une sorte de tunnel et une lumière, je n’avais aucune notion du temps, mais c’était un truc monstrueusement agréable, j’étais envahi par une douceur immense, un amour indéfinissable, je sentais plus que je ne le voyais des présences autour de moi, comme des voiles. Il y avait une voix, celle de l’infirmière, je suppose, qui disait: «Restez avec nous», et une autre, peut-être ma voix intérieure, qui évoquait mes enfants, le besoin de revenir.»

Le Genevois s’est réveillé en arrivant à l’hôpital de Vevey. La réintégration dans son corps est difficile, «comme lorsqu’on essaie de retirer une combinaison trop petite», avec presque le regret d’être revenu parmi les vivants. Les médecins ne lui trouvent rien, il a un cœur de marathonien. Il mettra des semaines à oser en parler. «Je suis agnostique, mais ce que j’ai vécu, je sais que ce n’est pas une illusion. Ma vie a été bouleversée en profondeur!» Ivan est revenu avec la conviction que le monde d’ici n’est, au fond, qu’un duplicata plus fade et moins authentique que celui qu’il a eu la chance de percevoir. Et garde une confiance inébranlable dans la vie. Malgré une période de chômage assez longue, il vient de se remarier, à 53 ans, et parle volontiers de son «nouveau moi». Capable, depuis sa NDE, de capter les sentiments, les émotions des personnes autour de lui, ce qui peut être parfois envahissant pour lui. «Au fond, c’est comme si ma fréquence vibratoire avait changé», admet ce solide gaillard qui est persuadé aujourd’hui qu’il y a une vie après la mort. «J’ai compris qu’on faisait partie d’un tout, d’un équilibre, au sein d’un univers beaucoup plus vaste que nous.»


 

«Je captais ce qu’allaient dire les médecins avant qu’ils ne le disent»

Haris Husakovic, 32 ans, Genève, a développé des dons spéciaux après sa NDE
Personnes ayant fait une expérience de mort imminente (NDE). ici Haris à Genève

«Je sais dans mes tripes que ce n’était pas une hallucination»

Julie de Tribolet

Haris avait 16 ans quand il a vécu une NDE au cours d’une opération orthopédique pendant laquelle son cœur s’est subitement arrêté. «Je me suis senti sortir de mon corps par le haut de la tête, comme on enlève un gant. Je me suis vu sur le lit d’hôpital sans capter tout de suite que c’était moi, en pensant: «Tiens, celui-là, il est mal en point!» Puis j’ai ressenti que tout était logique, limpide, naturel, je captais ce qu’allaient dire les médecins et les infirmiers avant même qu’ils ne le disent, j’avais envie de leur dire: «Hé, je suis là, tout va bien!» J’avais aussi une vision à 360 degrés, c’était chouette!»

Haris a vécu la phase du tunnel avec la fameuse lumière au bout. «C’était comme passer à travers dans un train à grande vitesse avec un grésillement lumineux, je pouvais communiquer par télépathie avec cette lumière, comme si elle faisait partie de moi, me connaissait mieux que moi. J’ai ressenti une grande chaleur, une vague d’amour, qui m’émeut encore quand j’en parle seize ans après. Ça me remplit toujours de joie, tous les jours. J’avais conscience d’un choix à faire, que, passé une certaine limite, je ne pourrais revenir en arrière. La lumière me faisait comprendre que ce n’était pas le moment. Il y avait aussi mon père, que je ne voulais pas laisser seul, c’est lui qui m’a élevé après le départ de ma mère.»

Haris va se sentir de nouveau projeté en arrière avec la tête qui passe en dernier. Revenir dans son corps n’est pas une expérience agréable: non seulement «il y a les douleurs dues à l’opération, mais le sentiment d’être trop serré aux entournures». Combien de temps a duré cette expérience? Il est incapable de le dire: «Trois minutes ou trois ans.» Ce qui est sûr, c’est que toute sa vie a été chamboulée. «J’ai mis des années à en parler, je suis quelqu’un de rationnel. Avant ma NDE, j’étais un garçon matérialiste, pas spirituel du tout. La NDE a tout changé, j’ai compris que c’était l’amour le plus essentiel et qu’il fallait profiter de cette vie sur terre pour le vivre et le donner. Même l’abandon de ma mère a été plus facile à accepter. Bien sûr, au début, j’ai douté de mes facultés mentales, mais je sais dans mes tripes que ce n’était pas une hallucination!»

Il est revenu de cette NDE avec notamment un don pour le magnétisme, les langues étrangères et les mathématiques. Le handicap dont il souffre à cause de sa displégie plastique n’est plus un problème pour ce geek passionné d’informatique. Il est confiant, il n’a plus peur de la mort.


 

«J’ai ressenti une peur terrifiante et incompréhensible»

Miggy Mavrommatis, 74 ans, Chavannes-de-Bogis (VD), a vécu plusieurs NDE et sorties de corps négatives
Miggy

«J’ai senti un bourdonnement dans les oreilles, puis je me suis retrouvée dans un tunnel».

Julie de Tribolet

Les souvenirs, même plus de cinquante ans après, sont encore si présents que cette ancienne professeure d’anglais doit souvent interrompre son récit, les larmes aux yeux. La première expérience de sortie du corps (OBE) remonte à ses 5 ans. Victime d’une agression par un inconnu, elle se voit d’en haut subir cet abus sans comprendre ce qui lui arrive. «J’étais devenue observatrice de ce qui m’arrivait, c’était terrifiant pour une enfant qui ne peut comprendre ce qui se passe.»

Miggy vivra encore une OBE deux ans plus tard, lors d’un séjour dans un centre pulmonaire. Durant une punition, qu’elle subit injustement à la place d’une autre camarade, on l’oblige à rester debout durant la nuit pieds nus sur sol froid. La gamine de 7 ans s’échappe avec sa conscience pour revenir dans sa chambre. L’expérience la terrorise de nouveau. Mais elle n’ose en parler à personne. La véritable NDE, elle la vivra à 22 ans, durant une opération banale.

«J’ai senti un bourdonnement dans les oreilles, puis je me suis retrouvée dans un tunnel, ou plutôt une sorte d’utérus sans couleur mais qui pulsait et m’aspirait de façon désagréable. Je détestais ne pas pouvoir contrôler mes actions. Je ressentais des présences moqueuses autour de moi. J’avais peur de devoir rester là toute seule pour toujours dans ce néant, je me sentais coupable. Des expériences de ma vie passées ont défilé, toutes négatives alors que j’avais déjà vécu de beaux moments dans mon existence.» En même temps, la jeune femme fait des allers-retours avec son corps resté sur la table d’opération. Un va-et-vient qui ajoute à sa peur, d’autant plus que Miggy souffre d’awareness, un fait insolite sur le plan médical qui fait qu’elle ressent la douleur même sous anesthésie.

«J’étais loin de l’image Bisounours avec douceur et amour qu’on entend sur les NDE», sourit-elle. Elle participera néanmoins à un groupe de parole, mis sur pied par le centre Noêsis, devenu l’Institut suisse des sciences noétiques, à Genève. «Entendre que d’autres personnes avaient vécu des NDE positives m’a aidée et un peu apaisée. Je me suis dit que j’avais peut-être une carte à jouer, je veux être en paix avec moi-même quand il s’agira pour moi de mourir.»

Par Patrick Baumann publié le 17 juin 2021 - 08:47, modifié 4 octobre 2023 - 10:56