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Le mariage de Julien Wanders, le «Kényan blanc»

Installé au Kenya, le coureur de fond genevois et recordman d’Europe Julien Wanders vient d’y épouser son amie, Kolly. Une union qui scelle son amour pour ce pays où, dit-il, «le temps s’arrête et tout est simple».

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Julien Wanders et Joan Jepkorir Kiprop, dite «Kolly», se sont mariés le 28 décembre dernier.

Julien Wanders (27 ans) et Joan Jepkorir Kiprop, dite «Kolly», se sont connus en 2017 et mariés le 28 décembre dernier. «Je ne me suis jamais senti étranger dans ma belle-famille. Nos deux familles sont très ouvertes d’esprit», dit-il.

Guillaume Laurent

Saisi ce matin-là dans sa demeure d’Iten, dans l’ouest du Kenya, le jeune marié Julien Wanders rentre de 15 kilomètres de course à pied et il se prépare à en parcourir 10 autres l’après-midi. Il dit qu’il va «super bien» et on tente d’imaginer son pays d’adoption, les guépards cachés dans les bois, la maison qu’il vient de construire et dont il explique qu’elle est «un peu atypique», parce qu’elle ressemble à un grand chalet au cœur de l’Afrique. Il ajoute qu’elle ne se situe pas loin d’une immense forêt et des centres d’entraînement de sa ville, ces larges espaces que des groupes de coureurs de fond de valeur mondiale arpentent chaque jour. 

Lui, il y est arrivé pour la première fois il y a presque dix ans, peu après avoir consacré son travail de maturité à essayer de comprendre la supériorité des coureurs kényans en athlétisme. Il en est revenu épuisé par la dureté des entraînements mais émerveillé, certain qu’il y retournerait. Dans la manière de vivre africaine, ce discret fils de musiciens qui vivait au cinquième étage d’un immeuble de Genève a tout de suite adoré «le manque de stress, le côté paisible des Kényans. Ici, le temps s’arrête, tout est simple. Si on rencontre quelqu’un dans la rue, on va boire un thé ensemble. Les gens sont avenants, il y a davantage de contacts directs qu’en Europe. C’est devenu chez moi.» Il s’est mis à vivre comme ses hôtes, à penser comme eux. Porté par des résultats sportifs remarquables, il en a hérité le surnom de «Kényan blanc».

Sa future femme, il l’a rencontrée en 2017. Habitante d’Iten, Kolly est l’amie d’un ami, son père était impliqué dans la fédération kényane d’athlétisme. Tout s’est passé avec simplicité. «Elle m’apporte de la joie, de la stabilité. Elle m’a beaucoup appris sur la vie en Afrique.» Ils se sont mariés fin décembre, en deux fois. D’abord à Iten, en petit comité, lors d’une cérémonie organisée par la famille de sa femme. Puis quatre jours plus tard et à six heures de route, dans la lumière pure du lac Naivasha, en présence d’amis qui avaient pu voyager depuis Iten et d’invités venus de Suisse, ses parents, sa sœur, des athlètes comme Julien Lyon et le marathonien genevois Tadesse Abraham. Il en sourit. «On a essayé un mélange entre Suisse et Kenya, mais il est vrai que cela a plus ressemblé à un mariage africain. Toutes les arrivées se faisaient par exemple en dansant...» 

Mariage de Julien Wanders

Les danses se sont succédé lors de ce mariage joyeux, empli de chants.

Guillaume Laurent

Peut-être à l’instant de dire ses vœux de bonheur le champion a-t-il alors revu combien il avait tracé sa route. Entre deux allers-retours entre le Kenya et l’Europe, il est devenu de 2018 à 2020 un athlète qui brillait au niveau continental. Au faîte de ses performances, il est allé jusqu’à battre les records d’Europe des 10 km sur route et du semi-marathon. 

Traversée du désert


Avec une philosophie d’airain – «Je n’ai pas de limites, je me dis que je peux progresser à l’infini» – il semblait voguer vers de nouveaux titres quand, il y a presque quatre ans, la belle machine à courir s’est enrayée. Il est alors entré dans une véritable traversée du désert. On a dû s’habituer à ne plus voir Wanders caracoler en tête du peloton de l’Escalade ou de la Corrida bulloise. La raison principale, il la situe dans un changement d’entraîneur. En remplaçant son coach de toujours, Marco Jäger, par le légendaire entraîneur italien Renato Canova, il a voulu miser sur davantage d’exigence. Il n’y a trouvé que du déséquilibre. «La combinaison n’a pas marché, même si je ne regrette rien et que j’ai aussi beaucoup appris. Je me suis mis en mode robot, à m’efforcer de suivre une masse d’entraînements que je n’arrivais pas à accomplir. A force d’absolument vouloir appliquer ce qui était écrit sur mon programme et de ne pas y arriver, je suis entré dans un cercle vicieux et j’ai perdu le plaisir de courir.» 

Une deuxième carrière se profile devant lui. Il vient de revenir à son premier entraîneur, qui le connaît par cœur. Celui-ci a commencé par lui ordonner six semaines de pause complète, cet été. «C’était essentiel et la première fois que je m’arrêtais ainsi. Je regrette d’avoir attendu autant pour le faire.» Depuis, sans forcer, il retrouve la joie perdue et aérienne des foulées qui s’enchaînent. «J’ai changé au bon moment. J’ai l’impression que la roue tourne et que tout va repartir.» Il a aussi réduit ses kilomètres, d’environ 200 km à environ 170 par semaine. Cet hiver, il vient de se tester dans trois courses en Suisse, dont l’Escalade. Il en a gagné une, à Saillon, et a constaté qu’il n’était plus si loin de ses meilleures journées.

Julien Wanders  lors de la course de la Sainte-Catherine à Saillon qu'il a remportée

Fin novembre, Julien Wanders a gagné la course de la Sainte-Catherine, à Saillon (VS). Les Jeux de Paris devant lui, il espère entamer une deuxième carrière après une longue traversée du désert.

Guillaume Laurent

Si le dieu malicieux des coureurs l’assiste, il a devant lui le 10 000 m des Jeux de Paris et un avenir de marathonien. Et des envolées éternelles dans les contrées kényanes, chez lui.

Par Marc David publié le 4 février 2024 - 07:03