Elle a déjà posé des mots dans des articles, les a laissés s’enfuir de son micro quand elle travaillait à la radio romande, mais c’est la première fois qu’elle ouvre un magasin de mots. Une enseigne tout à fait inédite au cœur du village de Chardonne (VD), où l’on peut venir acquérir des mots de saison parfois très poétiques, parfois très drôles, haïkus au bout de fils colorés à suspendre, pourquoi pas, sur un arbre de Pâques, ou cartes sur beau papier artisanal que l’on peut envoyer avec ce genre de phrases, soupapes du cœur: «A la fin d’une année recroquevillée, / Se déplier, se délier, pour envoyer / Des baisers de papier», ou: «Nous sommes des étoile filantes. Combien de temps peut-on confiner des étoiles filantes?»
Une chose ne se confine pas, c’est le tempérament balkanique de Sonia Zoran, qui aimerait bien que le covid ne soit qu’un mot et pas autre chose. Ce magasin, elle l’a ouvert avec une autre Sonia, Sonia Baechler, écrivaine et enseignante, qui propose notamment des ateliers d’écriture pour adolescents. La pandémie qui bouscule nos vies n’a évidemment pas aidé au lancement de ce lieu créatif qui organise aussi des soirées littéraires, parce que tout ce qui permet le jeu, le partage, l’échange autour des mots intéresse les deux femmes.
Pourquoi les portraits seraient-ils réservés aux gens célèbres? «J’aime chercher et cueillir ces étincelles qui éclairent une vie, un univers», dit Sonia, qui met désormais en lumière les trajectoires de monsieur et madame Tout-le-Monde, et elle aime ça. Leur vie, saisie comme une peinture de mots, écrite ou enregistrée. A l’occasion d’un mariage, d’une retraite, voire d’une naissance. Joli cadeau, surtout quand celle qui les conçoit a reçu le Prix Dumur 2015, l’équivalent du Goncourt pour les journalistes romands. Le Magasin de mots des deux Sonia leur ressemble. Solaire et convivial. Il suffit de pousser la porte. Même avec un masque.
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