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L’hydromel: la potion des dieux

Vin fabriqué à partir de miel, l’hydromel est la plus ancienne boisson alcoolisée. Malgré son goût et son histoire, il est peu connu. Visite chez un expert.

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Alexander Eckert

Le producteur Alexander Eckert, 46 ans, a du nez. Il sent immédiatement si son hydromel a suffisamment fermenté.

Véronique Hogger
carré blanc
Vanessa Nyfeler

Dans la distillerie d’Alexander Eckert, 46 ans, à Zofingue (AG), on trouve pêle-mêle de grands fûts en bois, des litres de miel et diverses distinctions. C’est ici, dans une cave au milieu d’une zone industrielle, que l’on produit de l’hydromel, soit du vin à base de miel. Derrière les portes de la salle de production, l’odeur est à la fois douce et légèrement fumée. Pour le reste, tout est calme, les machines sont éteintes. «Cela s’explique par le fait que le miel est en plein processus de maturation. Il faut d’abord attendre», explique l’expert.

La production de vin de miel est relativement simple, avec une recette de base de trois ingrédients: miel, eau et levure. Cette méthode était déjà connue des Germains, il y a plus de 3000 ans. Ils en sont considérés comme les inventeurs. Ils en buvaient lors de cérémonies en l’honneur des dieux. Plus tard, l’hydromel a été supplanté par le vin issu du raisin.

«Il est essentiel que j’utilise un très bon miel. Le seul moyen pour fabriquer le meilleur hydromel», explique le producteur. Il achète sa matière première en Bulgarie, en Pologne et en Ukraine. Il préférerait n’avoir que du miel suisse, mais de nombreux miels locaux ont un goût trop plat pour l’hydromel. Et ils sont beaucoup plus chers.

Alexander Eckert

Alexander Eckert n’emploie que du miel de qualité, qu’il achète principalement en Bulgarie, en Pologne, en Ukraine et en Suisse. Avec 300 kilos de miel, il fabrique environ 700 litres d’hydromel. Par rapport au vin et à la bière, la production d’hydromel consomme beaucoup moins d’eau et d’énergie.

Véronique Hoegger

Une fois qu’Alexander Eckert a produit son miel, il le stocke dans deux grands récipients, qui contiennent 300 kilos. Il peut ainsi produire environ 700 litres d’hydromel. Le miel est chauffé et mélangé à de l’eau du robinet, puis Alexander Eckert ajoute la levure. Celle-ci fait fermenter le sucre en alcool. Le mélange est ensuite fermé hermétiquement. Pour chasser l’oxygène, il ajoute du dioxyde de carbone; puis la fermentation commence. Selon le type de vin, elle peut durer des mois. «Mon mélange de miel actuel ne devrait être prêt qu’en février», note-t-il.

Pour savoir quand l’hydromel est prêt, il faut de la patience et de la sensibilité. Alexander Eckert possède ces qualités: il a été récompensé à plusieurs reprises lors de concours internationaux. Stockée dans un ancien fût de whisky, ce qui confère un goût fumé à l’hydromel, la variété BlackLabel NorseMet a ainsi remporté de nombreux prix. Les bouteilles Professor Bienlein ont aussi été récompensées. Pour cette variété, le bourbon ajouté donne une note de vanille.

Alexander Eckert

A l’aide d’une pipette, Eckert prélève un peu d’hydromel dans le fût en bois.

Véronique Hoegger

Phases lunaires au lieu du numérique

Le succès d’Alexander Eckert est probablement dû au fait qu’il travaille avec les phases lunaires. Il ne prépare l’hydromel qu’en lune descendante, afin que les levures travaillent plus lentement. Il remplit aussi ses bouteilles en lune descendante ou à la pleine lune, car la fermentation en bouteille est plus facile. Originaire de Stuttgart, il tente aussi des essais avec des épices, des herbes, des fruits et différents processus lors de la fermentation.

Si Alexander Eckert fait partie des véritables professionnels de l’hydromel, il provient pourtant d’un autre secteur. Pendant des années, il a travaillé comme informaticien et développeur de logiciels. «J’en avais assez du virtuel, je cherchais quelque chose de concret», explique-t-il. Il a bu du vin chaud à l’hydromel pour la première fois lors d’un marché de Noël, à Stuttgart. «J’ai été fasciné que l’on puisse préparer une boisson alcoolisée avec du miel.» Quand il a déménagé en Suisse, par amour, il a constaté que le choix d’hydromels était restreint. «J’ai bricolé dans ma cuisine et j’ai appris le métier seul», dit-il.

Depuis près de dix ans, ce père de famille est brasseur à plein temps. Comme son activité serait impossible sans le travail des abeilles, il soutient les espèces suisses menacées d’extinction. Et pratique l’apiculture pendant son temps libre. Mais le miel que produisent ses propres abeilles, il en a besoin pour sa famille, pas pour l’hydromel…

Alexander Eckert

L’hydromel est mis en bouteilles à la main et l’étiquette soigneusement collée.

Véronique Hoegger
Par Vanessa Nyfeler publié le 6 octobre 2022 - 09:16