«A la recherche du paradis blanc presque perdu ou la disneylandisation des Alpes suisses». C’est le titre de travail que s’est imposé Stéphanie Buret, il y a une année, avant de partir, boîtiers en bandoulière, à l’assaut de nos monts ensoleillés. Une sorte de retour aux sources pour cette Genevoise d’adoption, née à la vallée de Joux, enseignante et ethnologue de formation, qui s’est lancée à corps perdu il y a trois ans dans ce qui a toujours été sa passion: la photographie. «A force de sillonner le monde, je me suis quelque peu éloignée de nos réalités helvétiques.
Naguère habituée à fréquenter les sommets, j’ai voulu me replonger dans l’univers alpin pour en mesurer les changements», explique-t-elle. Et la photojournaliste, dont les reportages sont régulièrement primés, n’a pas été déçue. «Le rythme auquel nos montagnes de moins en moins enneigées s’urbanisent me fascine et m’inquiète à la fois», résume-t-elle. Pour la quadragénaire, c’est même une véritable révolution qui se joue là-haut. «Des téléphériques high-tech, des ponts suspendus énormes, des restaurants de luxe, des vitrines, des musées, des objets d’art, des spectacles, des installations à sensations fortes ne cessent de sortir de terre et de transformer le paysage des cimes. En quelques années, la montagne a été désacralisée.»
La force de l’image
Une «disneylandisation» alarmante qui suscite, par réaction, des comportements diamétralement opposés, a-t-elle remarqué. «Un retour à l’authentique, à la vie en harmonie avec la nature, dans des espaces purs. Dans cette veine, des hôtels écologiques de luxe se créent», constate Stéphanie Buret, qui a vécu à Madagascar et à Hongkong avant de bourlinguer et de ramener de ses voyages en Russie, en Mongolie, en Birmanie ou en Erythrée des témoignages poignants, attendrissants, toujours bouleversants. «Une photo saisit l’instant présent et contient une foule de détails qui nous échappent, même en live.
Elle possède à cet égard un impact visuel sans égal», estime celle qui s’exprime par la peinture lorsqu’elle pose ses appareils. Son périple alpin, la Genevoise l’imaginait comme un moyen de nous inciter à poser un regard sur les changements qui transforment notre patrimoine, à leur donner un sens. Au fait, qu’en a-t-elle conclu elle-même? «J’en retire un sentiment contrasté, presque ambigu. L’impression qu’on piétine cette nature comme pour mieux la dominer et en même temps avec la peur de la perdre.»