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Notre-Dame de Paris renaît de ses cendres

Le chantier pharaonique de la cathédrale incendiée en avril 2019 bat son plein. La flèche se dresse désormais dans le ciel de Paris et une date est fixée pour l’ouverture du monument retrouvé: le 8 décembre 2024. Images d’une renaissance, fruit d’un prodigieux savoir-faire artisanal.

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Le 6 décembre, la cathédrale Notre-Dame de Paris retrouve sa croix sommitale en métal.

Le 6 décembre, deux jours avant la visite du président Emmanuel Macron, Notre-Dame de Paris retrouve sa croix sommitale en métal, qu’une grue vient apposer. Un échafaudage de 600 tonnes a permis de reconstruire la flèche de 96 mètres, identique à la précédente, conçue par l’architecte du XIXe siècle Eugène Viollet-le-Duc.

Patrick Zachmann/Magnum Photo; Geoffroy Van der Hasselt/AFP/Getty Images

Cinquante-six mois ont passé depuis l’étrange nuit du 15 au 16 avril 2019, depuis ces heures où la France et le monde abasourdis se sont soudain tournés vers l’île de la Cité, à Paris, et la vieille demoiselle qu’on croyait éternelle et qui s’embrasait. La cathédrale Notre-Dame («Notre-Drame», titra alors le quotidien «Libération», sublime) brûlait à n’en plus finir et ses éléments les plus emblématiques disparaissaient: la flèche, les toitures de la nef, du chœur et du transept, la charpente d’une incroyable complexité, appelée «la forêt».

L’auguste édifice gothique, monument historique le plus visité d’Europe, a été bâti entre le XIIe et le XIVe siècle grâce à la science et à la patience ultimes des ouvriers du passé. Ce savoir-faire était-il perdu? Quand, le brasier encore fumant, le président français, Emmanuel Macron, fixa solennellement à cinq ans la durée de la reconstruction, on s’étouffa un peu dans les milieux professionnels et parmi les spécialistes des monuments historiques. Même s’il s’agissait du laps de temps qui fut par exemple nécessaire pour rebâtir le palais du Parlement de Bretagne (il brûla en 1994), une période de dix ans semblait plus réaliste.

15 avril 2019, incendie de Notre-Dame de Paris

Le 15 avril 2019, à 19h50, les images de la flèche de Notre-Dame de Paris qui s’effondre pétrifient le monde entier. L’incendie durera quinze heures et emportera aussi la toiture et la charpente.

Geoffroy Van der Hasselt/AFP/Getty Images

Pouvoirs publics et entreprises sonnent alors illico la mobilisation générale. Les milieux du bois, notamment, appellent à donner des arbres pour fournir la précieuse charpente en bois de chêne. «Notre-Dame était une vitrine de la forêt française. Nous espérons qu’elle le soit encore demain», intime le président du syndicat des propriétaires forestiers, Jean-Etienne Rime. Parmi 40 autres scieries, la scierie Corbat, de Vendlincourt (JU), participe aussi au sciage de ces chênes, avec du bois venu d’Alsace. 

Les échafaudages de la Cathédrale Notre-Dame de Paris, 1er décembre 2023

Le 1er décembre, à côté de la charpente de la nef reconstituée à l’identique de la «forêt» du XIIIe siècle, le pignon ouest est achevé. Placé entre les deux tours, il a souffert des flammes que le vent poussait dans sa direction. Des tailleurs de pierre l’ont démonté puis remonté pierre par pierre.

David Bordes/Rebâtir Notre-Dame de Paris

Défi relevé


Nous sommes en décembre 2023 et le défi fou est en bonne voie. Les dernières nouvelles données par l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris, qui assure la maîtrise d’ouvrage du chantier, a de quoi réjouir la plus revêche des gargouilles.

La date de réouverture est désormais confirmée au 8 décembre 2024, à peine plus de cinq ans après la catastrophe. L’organisation rappelle que, après deux ans consacrés à la sécurisation de l’édifice, aux études de projet, puis à la préparation et à l’attribution des appels d’offres, la phase de restauration a débuté concrètement en septembre 2021. Depuis, le chantier bat son plein. Ils sont environ 500 compagnons, artisans d’art et encadrants, à œuvrer d’arrache-pied, avec des résultats qu’on n’hésite plus à qualifier de spectaculaires. Qu’on en juge: l’ensemble des voûtes est reconstruit ou consolidé, tandis que s’achève le nettoyage simultané des murs, des décors peints et desdites voûtes, qui représentent une superficie de 42 000 mètres carrés. Alors que les échafaudages disparaissent peu à peu, les artisans s’émerveillent devant la blondeur retrouvée de la pierre.

Chantier de Notre-Dame de Paris: sculptures

Les sculptures sont partout dans et hors de la cathédrale. Cette restauratrice a pour mission de rendre leur éclat aux œuvres sculptées, en métal ou en pierre.

Patrick Zachmann/Magnum Photo

Plus emblématique encore, la flèche en chêne massif vient d’être montée en huit mois, surmontée de la couronne et de la croix dorées restituées conformément au dessin de l’architecte Viollet-le-Duc, en 1859. Le ciel de Paris a vu s’élever depuis cet été l’échafaudage superbement vertical qui entoure ladite flèche, culminant à 96 mètres. Pour le tabouret, c’est-à-dire la base, les bois ont été coupés en poutres et ont séché durant un an à dix-huit mois. Si on a entendu toutes sortes de sornettes autour du traitement des bois, on construisait en réalité au Moyen Age aussi avec du bois vert, qui finissait de sécher sur l’édifice. Seule polémique, mais vive: la réutilisation voulue à tout prix du plomb originel pour couvrir flèche et toiture. On craint ses effets nocifs s’il est inhalé. Tout aussi achevés ou en voie d’achèvement: les deux bras du transept et les charpentes médiévales de la nef et du chœur. De quoi rassurer Emmanuel Macron, qui s’est fendu d’une visite le 8 décembre, un an avant la réouverture, et peut d’ores et déjà fourbir un discours épique. Il a annoncé avoir invité le pape François à l’inauguration.

Le 16 décembre, bénédiction du nouveau coq de la cathédrale Notre-Dame de Paris

Le 16 décembre, l’archevêque de Paris, Mgr Laurent Ulrich, bénit le nouveau coq et y insère les reliques de saint Denis, de sainte Geneviève et celles de la couronne d’épines, avant son installation au sommet de la flèche.

Aurélien Morissard/Abaca/Imago-images

L’heure est à l’espérance. Le patron de la reconstruction, Philippe Jost, qui a succédé cet été au général Georgelin, décédé accidentellement, promet qu’au moment des JO, en juillet prochain, la flèche devrait être visible. Quant à l’architecte en chef des monuments historiques, Philippe Villeneuve, il ajoute dans «Le Pèlerin» que, «en 2024, la cathédrale sera la même et peut-être même plus belle, puisque nous l’aurons dépoussiérée et fait apparaître les belles couleurs des chapelles de Viollet-le-Duc».

En chiffres

16
Les statues monumentales de la flèche (12 apôtres et 4 évangélistes) restaurées par des dinandiers, serruriers et patineurs, en Dordogne.

500
Des maçons aux charpentiers ou échafaudeurs, le nombre de compagnons, artisans d’art et encadrants qui travaillent sur le chantier, au cœur de l’île parisienne de la Cité.

1000
Le nombre de personnes, réparties partout en France et ailleurs, qui ont œuvré simultanément à la renaissance de la cathédrale.

340 000
Les donateurs, issus de 150 pays, qui ont permis de recueillir 846 millions d’euros de dons.

Par Marc David publié le 6 janvier 2024 - 09:25