L'édito CôtéNature

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Dans son édition d'été, le magazine «CôtéNature» revient sur la tragédie du village englouti de Bad Bonn. Obnubilé par le progrès technique, l'Homme a dynamité puis noyé ce hameau fribourgeois, contraignant ses habitants à l'exil. Alors, que reste-t-il de Bad Bonn? Ses habitants ont-ils tourné la page? Soixante après les faits, «CôtéNature» qui est parti à la rencontre des témoins de l'époque, vous raconte la saga de ce paradis noyé. Un récit à retrouver dans le troisième numéro du magazine, actuellement disponible en kiosque.

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Bad Bonn dynamité par l'armée en 1963

La fin de Bad Bonn, dynamité par l’armée en 1963. «Ceux d’entre nous qui avaient une voiture allaient tous les dimanches contempler la destruction de la vallée, les énormes chamboulements du lit de la rivière et le chantier du barrage», témoignage de Rudy Wyss.

Walter Hirschi

L'histoire entre souvent en résonance avec l’actualité. A Brienz, dans les Grisons, des dizaines de villageois ont été contraints de quitter leur hameau, en attendant que la montagne s’effondre peut-être sur leurs maisons. Leur destin a ému tous les habitants du pays, chacun pouvant s’imaginer ce que représente le fait de tout abandonner et de partir avec pour seuls bagages ses souvenirs, la nostalgie en bandoulière.

La saga du village englouti de Bad Bonn (à lire dans l'édition d'été de CôtéNature) est elle aussi celle d’un déracinement, même si sa cause est ici toute différente. A Brienz, c’est la nature qui a imposé sa loi. Dans ce hameau fribourgeois, ce sont les humains qui avaient décidé de noyer ce qui fut la plus ancienne station thermale de Suisse, nichée au fond d’un canyon idyllique et sauvage, où coulait la Sarine.

Il y a soixante ans, le mot d’ordre était de produire toujours plus d’électricité. Et ceux qui n’étaient alors que des enfants se souviennent avec une émotion intacte de cette funeste année 1963. L’armée avait dynamité sous leurs yeux leur coin de paradis, puis les eaux du lac artificiel de Schiffenen avaient peu à peu englouti leur passé. Dans cette région très pieuse, la chapelle avait été démontée, les pierres numérotées, pour être reconstruite au sec. Mais seul l’ancien autel, installé dans l’actuelle église de Guin, a été réellement sauvé, les pierres ayant mystérieusement disparu.

Les conditions dans lesquelles les habitants de Bad Bonn ont dû quitter leur village pour cause de progrès technique étaient à l’image de l’époque, impitoyables. «Nous avons dû fuir plutôt que déménager, se souvient l’un d’eux. Des messieurs en costume nous ont dit qu’il fallait partir et ne pas espérer grand-chose de ces terrains qui ne valaient plus rien.» Pourtant, Bad Bonn avait connu son âge d’or. Une auberge réputée, des visiteurs de toute l’Europe et des fêtes connues loin à la ronde. Des artistes comme Bernhard Luginbühl ou Jean Tinguely aimaient y célébrer la vie jusqu’au bout de la nuit.

C’est peut-être pour cela que l’esprit de la fête souffle aujourd’hui encore sur la région. «Where the hell is Bad Bonn?» (où diable se trouve Bad Bonn?) interroge avec humour un panneau fixé sur les murs de la salle de concerts de Guin (Düdingen). C’est là que se tient chaque année le fameux Bad Bonn Kilbi, un festival de rock alternatif à la renommée internationale. Des riffs de guitare électrique ont remplacé les soirées d’accordéon d’antan. Mais des échos nostalgiques semblent leur répondre des profondeurs du lac artificiel.

>> CôtéNature, c'est des conseils pour faire fleurir votre jardin, mais aussi des portraits d'artisans de nos régions, des suggestions de balades, des recettes faciles à réaliser, des idées de bricolages, de décorations et de tricots, et bien plus encore. Le magazine est disponible en kiosque ou sur notre boutique en ligne au prix de 5.-.

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Par Caroline Zingg publié le 23 juin 2023 - 08:44