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L'édito

Sepp Blatter et Michel Platini acquittés: la cour des miracles

Le journaliste Christian Rappaz revient sur l'acquittement de Sepp Blatter et de Michel Platini. Mis en examen pour corruption, les anciens présidents de la FIFA et de l'UEFA étaient soupçonnés d'escroquerie. Si plusieurs institutions (Tribunal arbitral du sport, Tribunal fédéral, FIFA) avaient conclu à la culpabilité des deux pontes du football, le Tribunal pénal fédéral a statué vendredi en faveur des prévenus. Aucun mobile n’explique ce «crime» présumé, pas même l’appât du gain: un vrai miracle. 

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Sepp Blatter, l’ancien président déchu de la FIFA, heureux après son verdict. 

Alessandro Crinari
Christian Rappaz, journaliste
Christian Rappaz

«La justice des hommes est plus criminelle que le crime», disait le peintre et écrivain français Francis Picabia. Mais heureusement, en Suisse, nous avons le Tribunal pénal fédéral (TPF) pour dévier les balles perdues et rendre à celles et ceux qu’elles visaient leur vertu et leur statut de parangon. Prenez par exemple Sepp Blatter, l’ancien président déchu de la FIFA, et Michel Platini, son ex-homologue, exclu de l’UEFA.

Accusés et poursuivis depuis sept ans pour (on prend notre souffle) escroquerie, gestion déloyale, abus de confiance et de position dominante et faux dans les titres, ils ont finalement été absous de tous ces délits par le TPF. Au motif que le doute doit profiter aux accusés, ce dernier a en effet admis que faire verser à son institution – la FIFA – 2,3 millions de francs à un ancien employé – Platini – neuf ans après la fin de leur collaboration sans qu’aucun contrat écrit le prévoie était tout à fait concevable et ne représentait pas un avantage indu. Une véritable cour des miracles, donc, pour les deux hommes, tant ce revirement paraissait improbable. A la sortie de l’audience, le Haut-Valaisan de 86 ans, tel un pèlerin de Lourdes, ne s’y est d’ailleurs pas trompé: «Je crois en Dieu et en la bonté de nos tribunaux», a-t-il déclaré, puisant dans cette aubaine la gouaille et la malice qui ont fait sa légende.

Comme quoi tout le monde peut se tromper. On reprend de nouveau notre souffle: la commission d’éthique de la FIFA, sa commission de recours, le Tribunal arbitral du sport (TAS), le Tribunal fédéral, le Ministère public de la Confédération et la FIFA elle-même avaient été unanimes à condamner le duo. Mais, on le sait, un match n’est jamais terminé avant le coup de sifflet final. Le TPF veillait, estimant qu’aucun mobile n’expliquait ce «crime» présumé. Même pas l’appât du gain, bien que l’instruction ait révélé que ce n’étaient pas 2, mais 4 millions que réclamait initialement Platini, en plus des 3,8 millions de francs déjà facturés et payés entre 1999 et 2002. Conséquence, l’ex-numéro 10 des Bleus n’a pas besoin de restituer les 2 millions, ni les 300 000 francs de charges sociales payées par la FIFA et, cerise sur le gâteau, touchera 140 000 francs de la Confédération pour ses frais d’avocat. Soit 40 000 de plus que Blatter. Circulez, le ballon tourne de nouveau rond.

Par Christian Rappaz publié le 13 juillet 2022 - 07:53