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Informatique et formation

Simi, 13 ans, la génie qui casse tous les codes

Simi admire Elon Musk et rêve de passer ses vacances sur Mars. En attendant, elle a cofondé la société Girls Can Code afin de permettre aux filles d’apprendre dès l’enfance la programmation informatique et de s’assurer ainsi un avenir dans le monde du travail. C’est sa mère qui l’a initiée aux bases de ce langage.

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RENCONTRE_AVEC_SIMI_SINGH

L’un des hobbies de l’adolescente zurichoise Simi Singh, outre les puzzles et les Lego, c’est l’analyse de datas et le codage informatique.

Gabi Vogt

Pendant le confinement, en octobre 2020, lors d’une visioconférence organisée depuis la Suisse par l’association Féminin Pluriel, Samriddhi Singh, surnommée Simi, a pris la parole à Zurich devant un auditoire formé d’une soixantaine de femmes indépendantes. Elle a expliqué sa passion pour la programmation informatique et combien il serait judicieux, pour chacune des intervenantes, d’apprendre à coder. Jusque-là rien d’extraordinaire, sauf que Simi n’a que 13 ans.

Cette adolescente zurichoise est un peu notre Greta Thunberg, en version informatique. Ce jeune prodige, qui a appris le codage à l’âge de 4 ans, a cofondé la société Girls Can Code afin de transmettre ses connaissances aux filles et de leur donner des outils essentiels à la compréhension de ce langage. A ses yeux, une femme qui sait coder peut tout faire dans la vie. «Quand on sait créer des programmes, on peut ouvrir toutes les portes», dit-elle avec assurance.

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Simi entourée de ses parents, Amitabh et Tanvi Singh, et de sa sœur aînée, Samragye. C’est la mère de l’adolescente qui lui a appris à coder dès l’âge de 4 ans.

Gabi Vogt

Simi Singh est née en Inde dans une famille où l’informatique fait partie du quotidien. Elle a vécu à Bangalore jusqu’à l’âge de 4 ans, juste assez pour garder quelques souvenirs vagues de son pays d’origine: le jardin d’enfants, qu’elle détestait, et le Taj Mahal, qu’elle adorait. Depuis son plus jeune âge, elle voue une passion aux Lego et aux puzzles. Sa maman a bien essayé de lui faire faire autre chose, comme sa sœur aînée, qui jouait à 8 ans en niveau national, mais elle n’était pas intéressée. «Simi déteste la compétition, explique sa mère, Tanvi Singh. Elle pense que le monde serait meilleur si les gens collaboraient pour résoudre des problèmes, au lieu d’entrer en concurrence les uns avec les autres.»

En observant la passion de sa fille pour les constructions en 3D, Tanvi Singh s’est dit qu’avec son sens de la logique elle pourrait peut-être apprendre le codage. «Je lui ai enseigné les bases du langage dans lequel s’écrivent les programmes informatiques, explique cette femme qui travaille en tant que «managing director» chez Credit Suisse et qui dirige une équipe de 200 «data scientists» et programmateurs. Au début, on faisait cela les week-ends, comme un jeu. Puis Simi a commencé à maîtriser un concept après l’autre.» «Il s’agissait de combiner des blocs formés de lettres, de symboles et de chiffres. Comme avec les Lego ou les puzzles, on doit résoudre les problèmes pas à pas pour arriver à un résultat. Une fois que l’on a appris la syntaxe, c’est très simple», dit l’adolescente.

En 2011, ses parents ont eu tous les deux la possibilité de prendre un poste en Suisse pour quelques années. Simi, qui parlait l’hindi et l’anglais, a dû apprendre l’allemand, le suisse-allemand, le latin et le français. «Je suis dyslexique et, pour moi, l’apprentissage des langues, avec toutes les exceptions, c’est très compliqué», confie l’adolescente. Pour obtenir la moyenne à l’école, elle est obligée de travailler trois ou quatre fois plus que les autres, «jusqu’à quinze heures par jour», explique sa mère. Etonnamment, le codage n’entre pas dans la catégorie «études laborieuses»: Simi adore cela. «Son exemple est la preuve que, si les dyslexiques ont des difficultés dans certaines matières, ils ont des facilités dans d’autres, explique sa mère. Les parents et les professeurs devraient donc les encourager dans ces domaines. Et si son histoire pouvait changer la vie d’une seule personne, ce serait merveilleux.»

Simi a suivi des cours en ligne sur la plateforme de formation Udacity, spécialisée dans le domaine de la programmation informatique, et, le 20 juillet dernier, elle a obtenu un «data analyst nanodegree». «Elle était la plus jeune diplômée!» dit fièrement sa mère. «Analyser les datas, c’est mon hobby», confie l’adolescente. Et quand elle ne s’amuse pas à coder ou à construire des châteaux en briquettes, elle fait de l’équitation, tous les mercredis. Elle apprend aussi à tirer avec une arme à feu dans un club de tir local. «Sur une cible, précise-t-elle. Cela relaxe l’esprit.»

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Simi Singh donne des cours de programmation à de jeunes élèves à Zurich.

DR

Parce que aucune des amies de sa classe de 8e ne s’intéressait à sa passion, Simi a eu l’idée de créer un club de filles afin de les initier à ce langage. Le hasard faisant bien les choses, l’adolescente a fait la connaissance de la directrice générale de la TechSpark Academy, Kate Mckee, et, avec quelques autres femmes, elles se sont alliées pour créer une société à but non lucratif, Girls Can Code, qui a été inaugurée le 14 novembre dernier. «Le premier atelier de découverte comptait six filles, dont une de 7 ans», souligne Simi. Elle rêve que l’on apprenne aux filles à coder dès le jardin d’enfants. «Cela vous apprend à penser de manière logique et vous offre des possibilités infinies pour trouver un emploi.» Pour l’instant, aucun garçon ne s’est présenté au portillon, mais il sera accueilli comme les autres filles, précise la cofondatrice.

Pendant ses vacances d’été, l’adolescente a effectué un stage à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) pour participer à un programme de recherche intitulé «Trusting robots» avec des enfants de 6 à 8 ans. Le but étant de savoir si l’on peut faire confiance à un robot. «Ce n’est pas la peine de développer des softwares complexes si les humains ne se sentent pas en sécurité avec eux, car, dans ce cas, ils ne les utiliseront pas», dit-elle. Les enfants, dans une grande majorité, écoutaient les instructions du robot. Mais quand celui-ci leur posait des questions, ils ne voulaient pas lui répondre et ne souhaitaient pas communiquer avec lui, comme ils le feraient naturellement avec un être humain. De toute façon, les robots feront partie de notre vie, alors autant leur faire confiance. Est-ce que Simi leur fait confiance? «Je dois avant tout avoir confiance en la personne qui les a programmés. C’est elle qui définit les limites du robot.»

Simi Singh voue une admiration sans borne à Elon Musk et à son programme SpaceX. «Je rêve d’aller passer mes vacances d’été sur la planète rouge, quand les humains pourront considérer d’autres mondes comme leur maison. On doit continuer à explorer notre système solaire, savoir si d’autres espèces y vivent. Mais je suis consciente que cela ne se fera pas de mon vivant», dit-elle. Sinon, elle adorerait créer une machine à remonter le temps. «Afin de donner aux femmes du passé les mêmes droits que les hommes. Et ensuite, revenir dans le présent pour voir à quel point l’humanité aurait progressé. De manière plus réaliste, il faudrait faire en sorte que ce changement ait lieu aujourd’hui. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans un monde dominé par les hommes. Dans tous les domaines, nous avons besoin d’un autre point de vue. Sinon, on ne trouvera pas de solutions aux problèmes qui se posent aujourd’hui.»

Sur la page d’accueil de Girls Can Code, on découvre le visage des cofondatrices et une phrase qui les caractérise. Simi a choisi cette citation de la philosophe russe Ayn Rand: «The question isn’t who’s going to let me; it’s who’s going to stop me» (la question n’est pas de savoir qui va me donner l’autorisation de faire, mais qui va m’en empêcher). Personne, visiblement…

Par Isabelle Cerboneschi publié le 4 mars 2021 - 08:54