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Athlétisme

Simon Ehammer: «Je veux une médaille aux Jeux olympiques»

Sa récente neuvième place en saut en longueur aux Mondiaux de Budapest ne l’émeut pas plus que cela. Médaillé de bronze en 2022, le sauteur et décathlonien de niveau mondial Simon Ehammer continue à viser des objectifs élevés avec une audace aux accents très peu… helvétiques.

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Simon Ehammer

Attaché à son coin de pays, l’Appenzellois aux origines autrichiennes de 23 ans Simon Ehammer (ici sur le Säntis) n’envisage pas de quitter la Suisse orientale pour s'entraîner.

Cyrill Matter

- Simon Ehammer, quand vous regardez le menu au restaurant, aimez-vous avoir l’embarras du choix?
- J’aime disposer d’un vrai choix. Surtout si je vais manger avec mon amie Tatjana et qu'il faut une offre avec viande et une autre sans. Pourquoi cette question?

- Parce qu’avant les Mondiaux d’athlétisme qui viennent d’avoir lieu à Budapest, vous avez été confronté à un choix: saut en longueur, décathlon, les deux?
- Il y a un an, j’ai d’abord pensé disputer les deux disciplines, comme à Eugene en 2022. Cela aurait pu se faire sans problème. J’ai continué à m’entraîner à fond dans les deux disciplines aussi longtemps que nécessaire avant de voir où je me situais. J’ai longtemps refoulé ce choix, car je ne voulais me décider contre aucune des deux disciplines. Aussi parce que je savais que mes chances étaient bonnes dans les deux compétitions. Mais il était déjà clair qu’une médaille en saut en longueur était un peu plus réaliste, parce que mon niveau y est plus constant. Mais je savais que si j’étais parvenu à répéter mes performances à l’entraînement au décathlon, j’aurais été prêt à atteindre les 8600 points et à me battre pour le podium. Cela a rendu la décision d’autant plus difficile.

- Votre cœur continue de battre plus fort pour le décathlon?
- Exactement. Mais mon épaule n’est toujours pas à 100%. Le fait qu’elle ne soit pas complètement rétablie et que je ne puisse pas lancer le javelot à 55-58 mètres a finalement été la clé de ma décision. De plus, j’ai montré à Oslo, avec un saut de 8,32 m, que je pouvais aussi sauter très loin dans une compétition individuelle. 

- Sur votre site, vous citez l’argent du décathlon aux Européens et vos deux records suisses de l’an dernier. Pas un mot sur la médaille de bronze aux Mondiaux en saut en longueur. Pourquoi?
- Il s’agit plutôt de la signification émotionnelle. Le bronze des Mondiaux fut bien sûr important pour moi, car j’ai pu écrire un peu de l’histoire de l’athlétisme suisse. Mais, en tant que compétition, les Championnats d’Europe furent mille fois plus beaux. Pas pour les performances, mais pour l’ambiance. A Munich, tout le monde a pris plaisir à l’athlétisme et a agi en connaisseur. A Eugene, ce fut très différent: le public américain n’a fait qu’encourager et acclamer ses athlètes. De plus, Munich m’a offert ma première médaille internationale en décathlon au niveau actif. Une immense satisfaction, alors que beaucoup disaient que je devais me limiter au saut en longueur. Or j’avais trop de lacunes dans certaines disciplines du décathlon pour posséder de réelles chances de médaille.

- Des considérations économiques entrent-elles en ligne de compte dans l’arbitrage entre ces disciplines, car il y a de l’argent à gagner dans les meetings de la Diamond League? Or le décathlon en est absent.
- C’est vrai, mais j’y pense moins. Tout est plutôt lié à la planification. Au début de la saison, je me concentre sur le décathlon avec celui de Götzis, où j’atteins normalement assez tôt les limites pour les championnats. Cela enlève beaucoup de pression. Ensuite, je peux utiliser la Diamond League pour faire de la publicité pour moi et mes sponsors. C’est une combinaison cool.

Simon Ehammer

Du 110 m haies (à g.) au javelot (en haut à dr.), Simon Ehammer détient le record national du décathlon depuis 2022, avec 8377 points. Ainsi que celui du saut en longueur (en bas à dr.), avec 8,45 m la même année.

Imago; Gian Ehrenzeller/Keystone; Matthias Schrader/AP/Keystone

- Il arrivera un moment où le petit site d’entraînement de Teufen (AR) ne correspondra plus à votre statut de classe mondiale, non?
- J’ai déjà eu des offres d’universités et j’ai toujours refusé, car tout se passe bien ici. Si je stagnais pendant les trois prochaines années, je me dirais qu'il est temps de prendre un nouveau chemin. Mais je n’ai pas du tout ce sentiment. Avec mes entraîneurs, les frères René et Karl Wyler, ce n’est depuis longtemps plus une relation entraîneurs-athlète. Nous sommes des collègues proches, presque une famille. C’est aussi très important pour moi.

- Que dire de vos zéros en saut en longueur?
- C’est ma nature, je n’aime pas la tactique.

- Cette question vous agace-t-elle?
- Non, je dois simplement l’expliquer encore et encore. Je suis quelqu’un qui se donne à fond. En décathlon, mon résultat en saut en longueur peut aussi faire la différence. Cela m’énerverait autant que trois zéros si je sautais 7,70 m et perdais ainsi 40 ou 50 centimètres et beaucoup de points. Un saut de sécurité ne m’aurait rien apporté à Götzis. Je suis comme cela. 

- Votre potentiel est loin d’être épuisé. Où voyez-vous le plus de possibilités d’amélioration?
- Certainement dans les lancers. Au poids, j’étais assez bien avant que la blessure ne me fasse -reculer, puis que je revienne sur la bonne voie. Cette année, j’ai régulièrement pu atteindre 38 à 39 mètres au disque. Ce n’est pas encore suffisant, mais il y a une certaine constance et iI m’arrive parfois de lâcher un jet à 42 mètres. Au javelot, je devrais pouvoir atteindre les 60 m un jour, quand mon épaule sera complètement rétablie. Même au saut à la perche, il y a de quoi faire. Mes 5,20 mètres sont corrects, mais 5,40 à 5,50 m devraient être possibles.

- Et au saut en longueur?
- Si l’on considère le saut annulé de justesse cet été à Oslo, je peux atteindre 8,50 à 8,55 m, même en déduisant les 3 centimètres de dépassement. C’est tout à fait possible cette année. 

- Vos objectifs ont-ils évolué avec vos succès?
- Pas vraiment. Je rêvais déjà des Jeux olympiques à 13 ans, quand j’ai intégré l’école de sport de l’Appenzellerland. Maintenant, je le dis sans détour: je veux une médaille olympique, dès 2024. Pareil en 2028. 

Par Iso Niedermann publié le 9 septembre 2023 - 08:58