A quel moment peut-on dire que nous vivons un point de rupture? Quand un pays neutre comme la Suisse prend des sanctions contre un autre Etat, pourrait-on dire. Et cette fois, nous y sommes. L’invasion de l’Ukraine par Vladimir Poutine a complètement rebattu les cartes de la géopolitique mais aussi de notre rapport intime à la société dans laquelle nous souhaitons vivre. Cette guerre que personne ne voulait voir venir est désormais une réalité. Elle correspond à la fuite en avant d’un dictateur qui a patiemment appliqué une stratégie pour assouvir ses rêves personnels de grandeur. Son erreur aura été de concevoir cela comme tout bon autocrate en bout de course. Après vingt-deux ans d’exercice du pouvoir et emporté dans son délire paranoïaque, Vladimir Poutine s’est isolé. Au point qu’il ne voit pas l’absurdité d’une démarche dont il aura du mal à sortir grandi.
Pour la première fois de son parcours, le dictateur va perdre une guerre. Celle de l’image a déjà été remportée par le formidable peuple ukrainien et son président, littéralement transcendé par la crise. De Kiev à Lviv, on ne voulait pas croire à la possibilité d’un conflit. Mais on s’y est préparé, en suivant notamment les préceptes du concept de défense suisse avec son armée de milice. Cela fait des mois que l’on s’entraîne dans les forêts de bouleaux et aux confins des villes ukrainiennes. Le caractère forgé par les épreuves, le patriotisme en bandoulière, le peuple bleu et jaune a montré un tempérament de feu et témoigne d’un humour qui fait mouche sur les réseaux sociaux. Au vieux potentat qui humilie ses sbires à la télé depuis sa maison de meringue font face les images de ce paysan qui vole un tank de l’assaillant avec son tracteur, de jeunes citadins qui mettent leur vie entre parenthèses pour fabriquer des cocktails Molotov et celles d’un pouvoir qui tient son rang avec dignité.
Volodymyr Zelensky est le héros que l’Europe se cherchait. A lui tout seul, il a réveillé des dirigeants qui avaient pris le risque de s’assoupir auprès de l’ogre Poutine. Mieux, il les a emportés dans sa bataille pour la liberté. Les grands mots et les belles valeurs sont de sortie mais, cette fois, ils ne sont pas là juste pour le décor. Ils inspirent, du chef d’Etat au simple citoyen. Soutenir les Ukrainiens, c’est réaffirmer notre foi dans la démocratie et dans l’idée d’un destin commun aux habitants de ce continent.
>> Découvrez les autres articles concernant le conflit Ukraine-Russie: