Du cochon machiavélique au mouton physionomiste, même les espèces animales les moins considérées font preuve d'intelligence. Découvrez les performances étonnantes de dix d'entre elles, avec l'éclairage d'un spécialiste de la question, Emmanuelle Pouydebat, biologiste de l'évolution au CNRS.
La conscience de soi. On savait les éléphants intelligents et sensibles, capables de coopérer, de se servir d’outils, comme d’une branche qu’ils effeuillent pour en faire une tapette à mouches, de faire preuve d’altruisme et de compassion et, bien sûr, d’une mémoire... d’éléphant. On a découvert en 2017 qu’ils avaient aussi conscience de leur propre corps, une capacité rare dans le règne animal et encore inexistante chez un enfant de 2 ans. Pour faire ce constat, on a placé un éléphant d’Asie sur un tapis auquel était attaché un bâton et on lui a demandé d’apporter ce bâton à l’expérimentateur qui attendait un peu plus loin. L’éléphant a assez vite compris que pour déplacer le bâton, il fallait déplacer le tapis et donc retirer le poids qui clouait celui-ci au sol: le poids de son propre corps, dont l’éléphant prouvait ainsi avoir conscience. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
La pieuvre par neuf. Les pieuvres ont neuf cerveaux! Deux tiers de leurs neurones sont répartis le long de leurs tentacules, ce qui permet à ces huit «bras» de prendre des décisions sans intervention du cerveau. Les pieuvres géantes du Pacifique ont appris à ouvrir des bocaux, de l’intérieur pour s’en échapper ou de l’extérieur pour en retirer de la nourriture. Une autre espèce, la pieuvre mimétique, sait imiter une quinzaine d’espèces marines afin d’échapper à ses prédateurs en les effrayant ou en les trompant. Pour contrefaire la sole, par exemple, elle rabat ses tentacules vers l’arrière afin d’avoir la forme du poisson plat, puis se propulse en ondulant à la façon de la sole. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
L'altruiste. Le ouistiti se distingue par son aptitude à coopérer. Dans la nature, il appelle souvent ses congénères pour savoir où ils se trouvent et il partage sa nourriture avec les membres du groupe. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
L’intelligence machiavélienne. Animal de compagnie comme ce cochon vietnamien, ou future chair à saucisses comme le porc ordinaire, les cochons ont des capacités cognitives égales, voire supérieures, à celles des chiens et des chimpanzés. Ils ont notamment un certain goût pour le jeu et sont capables de développer de l’empathie les uns envers les autres en coopérant ou en apprenant du comportement d’autrui. Mais ils peuvent aussi faire preuve de ce que les éthologues appellent une intelligence machiavélienne, par exemple pour empêcher un congénère de piquer leur déjeuner: s’ils se voient suivis, ils trompent l’autre – sauf si c’est un ami – en le baladant jusqu’à pouvoir échapper à sa surveillance et se rendre, ni vu ni connu, à leur cachette de nourriture. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
Le physionomiste. Quant au mouton, généralement considéré comme pas très fute-fute, il est pourtant capable de reconnaître un visage humain, même de trois quarts, et, plus surprenant, d’identifier les émotions qui s’y affichent: en fait, ses capacités de reconnaissance faciale sont comparables à celles des primates et des humains! Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
L'outilleur. Enfin, des corbeaux calédoniens ont réussi à se servir d’un distributeur automatique de nourriture: on leur a d’abord appris à choisir, entre des coupons en carton de taille différente, celui qui donnait accès à la nourriture une fois glissé dans la machine. Puis on leur a donné une plus grande feuille de carton, qu’ils ont eu l’idée de découper avec leurs griffes et leur bec de manière à obtenir des coupons de la taille de celui qui donnait accès à la nourriture une fois glissé dans le distributeur. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
La meilleure mémoire du monde canin. Si le border collie est réputé pour être l’une des races de chien les plus intelligentes du monde, aucun de ces bergers n’est encore arrivé à la patte de Chaser. Eduquée par John W. Pilley, un professeur de psychologie à la retraite qui a décidé de mesurer l’intelligence canine en entraînant sa chienne pendant trois ans, à raison de cinq heures par jour, cinq jours par semaine, Chaser maîtrisait une cinquantaine de mots à 5 mois. A sa mort cet été, à l’âge de 15 ans, la chienne était capable de reconnaître 1022 objets rien qu’en entendant leur nom, mais aussi de les classer par fonction ou par forme. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
Le génie de l’ingénierie. On le constate déjà dans la construction de son nid à la structure extrêmement complexe, l’orang-outan est calé en ingénierie. Il en a donné une démonstration encore plus bluffante en laboratoire face au test suivant: comment attraper des cacahouètes qui flottent sur un peu d’eau tout au fond d’un tube de verre impossible à renverser? Et cela sans avoir accès à aucun outil qui permettrait de les pêcher. Eh bien, il n’a fallu que neuf minutes au moins doué des singes soumis au test pour avoir l’idée de remplir sa bouche d’eau dans un réservoir voisin pour la recracher dans le tube et de répéter l’opération jusqu’à ce que le tube soit rempli et les cacahouètes à portée de main. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative
L'imitateur. Réputé pour sa capacité à imiter la parole humaine, le perroquet gris du Gabon est aussi connu pour sa capacité à raisonner comme un humain de 3 ans. Alex, le plus célèbre des gris du Gabon, faisait preuve d’une remarquable maîtrise des mathématiques et du langage, tandis que l’un de ses congénères a réussi à se commander des friandises via l’enceinte connectée de sa maîtresse. Vincent J. Musi/ National Geographic Creative