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Danielle et Romain Voisard: «La mort, ça s’apprivoise»

Des couples romands qui ont choisi un jour de ne plus se quitter pendant la journée racontent avec le sourire le joli lot de confiance et de souplesse nécessaire pour que l’amour triomphe du quotidien. Témoignage de Danielle et Romain Voisard, un couple qui officie en tant que croque-morts.

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Danielle et Romain Voisard

Danielle et Romain ont créé leur entreprise de pompes funèbres en 1997: «Vivre pleinement l’instant présent, c’est ce qui compte.»

Julie de Tribolet

Le visage rond, avenant, des yeux rieurs qui se mouillent lorsqu’il évoque sa maman, qui vient de mourir à 93 ans, Romain Voisard, 70 ans, natif de Saignelégier (JU), respire l’empathie. Danielle, son épouse, 66 ans, qui a vécu à Nyon, à Bâle et à Londres, porte le foulard avec la classe des ex-hôtesses de l’air de chez Swissair, où elle travaillait avant le drame du SR 111, le 2 septembre 1998. «J’étais de réserve sur ce vol. Le maître de cabine avait été mon formateur. Le cadet de nos trois fils refusait que j’y retourne et moi, j’avais envie de changer de vie, même si j’adorais voyager.»

Son mari vient du monde horloger. Il accueillera aussi des requérants d’asile. Ancien cavalier, Romain Voisard se souvient de leur rencontre en marge d’un concours hippique aux Franches-Montagnes: «Un copain me l’a présentée comme la plus belle femme d’Europe centrale. Je lui ai proposé un café.» La suite, ce sera le mariage en 1980, suivi d’un tour du monde… en avion.

L’empathie, vertu familiale

Quarante-trois ans plus tard, ils sont encore présents dans l’entreprise de pompes funèbres qu’ils ont ouverte à Delémont le 1er juillet 1997. «On avait envie d’aider. Là, c’était du concret.» Danielle a été une pionnière en la matière. L’empathie: une vertu familiale. Jérôme, Stéphane et Eric Voisard ont embrassé la vocation de leurs parents.

«Notre métier consiste à accompagner la famille en deuil, de A à Z. C’est elle qui décide selon ses moyens, ses convictions, sa foi, etc. On la rassure, on la guide.» Le Jura a passablement changé. «Il y a de plus en plus de cérémonies laïques. Plutôt que l’église, certains préfèrent un stade de foot, une grange, la forêt.»

Comment cheminer avec la mort quand on s’aime? Le couple dédramatise: «La mort, ça s’apprivoise. Elle fait partie de la vie.» Pour se protéger tout en travaillant ensemble, les Voisard ont leurs soupapes. La musique (cuivres) pour lui: fanfare, brass band et Pipes and Drums of Jura. Danielle, bilingue, a traduit et supervise le brevet fédéral d’entrepreneur de pompes funèbres en Suisse romande, depuis 2017. Elle s’engage aussi avec le Zonta Club «pour aider des femmes à se relancer». Et avec quatre petits-enfants, le couple ne s’ennuie pas. «Friands de contacts et curieux de la vie», Danielle et Romain Voisard ont encore ce besoin d’apporter leur aide.

Et la Saint-Valentin, alors? «On marque le coup, on s’ouvre une bouteille, mais on peut aussi se retrouver au funérarium pour une mise en bière, avouent-ils en souriant. Vivre l’instant présent pleinement, voilà, au fond, ce qui compte.»

>> «L'illustré» est parti à la rencontre de cinq couples romands qui s'aiment et travaillent ensemble. Ils sont boulangers, restaurateurs, croque-morts ou même officiers à l’Armée du Salut. Retrouvez d'autres témoignages:

Par Blaise Calame publié le 17 février 2023 - 08:55