1. Home
  2. Actu
  3. Élie Grappe, cinéaste: «Ça ne devrait pas être suspect de pouvoir vivre de l’art»
Art

Élie Grappe: «Ça ne devrait pas être suspect de pouvoir vivre de l’art»

Leur profession suscite souvent l’étonnement. Peut-on vivre de l’art en Suisse? Ces jeunes artistes le prouvent. Ils ont moins de 30 ans et travaillent à temps plein dans les milieux de la peinture, de la performance, du cinéma et de la musique. Portrait d'Élie Grappe, cinéaste veveysan de 29 ans.

Partager

Conserver

Partager cet article

Elie Grappe

Elie Grappe prend le temps de travailler les scénarios à fond, chez lui, à Vevey.

Bertrand Rey

En 2011, du haut de ses 17 ans, Elie Grappe s’inscrit à l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL) et pose ses valises en Suisse. Il vit aujourd’hui à Vevey, ville d’images et dernière demeure de Charlie Chaplin. Le jeune réalisateur se fera-t-il une place dans la lignée de Charlot? «Ce n’est pas à moi de le dire», rigole-t-il avec humilité. Ce Lyonnais d’origine a choisi l’ECAL, car «l’année préparatoire y est déjà une école d’art». Durant sa troisième année d’études, Elie Grappe a l’occasion de présenter un projet à des producteurs. Le courant passe entre lui et Jean-Marc Fröhle, de Point Prod, ce qui donnera naissance au court métrage «Suspendu». Dans la foulée, ce même producteur lui propose de se lancer sur un long métrage, film qui deviendra «Olga», sorti en salle en 2021.

C’est lors de cette collaboration, juste à la fin de ses études, que la carrière d’Elie Grappe s’ancre en Suisse. «Etant Français, il me fallait un permis pour travailler en Suisse. Et pour avoir ce permis, je devais avoir un contrat de salarié», explique le cinéaste. A travers cette condition, il négocie avec son producteur et parvient à échelonner son salaire dans le temps. «C’est grâce à ça que j’ai pu me concentrer sur le film et je fonctionne toujours de cette manière. C’est moins qu’un salaire moyen en Suisse, mais ça me suffit pour vivre.»

Loin de lui les rêves de gloire et de richesse, Elie Grappe préfère garder les pieds sur terre. «Quand je reçois un peu plus d’argent, je le mets de côté pour de possibles périodes creuses.» Il confie qu’il s’interroge sur sa façon de consommer et qu’il essaie de limiter ses dépenses au nécessaire. «J’ai conscience de ne pas être le moins bien loti. Je connais d’autres artistes qui créent autant que moi et gagnent moins», relativise le réalisateur en insistant sur cette injustice. Selon lui, la pression financière pousse les artistes à privilégier la productivité plutôt que la justesse. «L’art devrait être un bien commun. Ça me semble essentiel, et ça ne devrait pas être suspect de pouvoir vivre de cela tout en voulant le faire bien.»

Quand on l’interroge sur son activité, Elie Grappe en parle comme de «n’importe quel autre métier». Modeste, il avoue que, avant la diffusion de son film «Olga» en salle, il éprouvait «le besoin de prouver la vérité de [son] travail». Un job de longue haleine pour inscrire sa signature dans ce milieu «qui génère parfois trop de fantasmes, vu de l’extérieur».

>> «L'illustré» est parti à la rencontre de quatre jeunes Romands qui vivent de leur art. Retrouvez d'autres portraits:

Par Sandrine Spycher publié le 28 avril 2023 - 09:47