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Jérôme Aké Béda: «On n’est pas Vaudois si on n’aime pas le chasselas!»

Leurs métiers sont typiquement suisses et leurs origines sont diverses. Dans cette série d’été, «L’illustré» vous fait découvrir le parcours professionnel et personnel de cinq Suisses AOP (Aux Origines Plurielles). Aujourd’hui, partons à la rencontre de Jérôme Aké Béda. Venu de Côte d’Ivoire et installé en Lavaux, ce passionné de chasselas a été élu «Sommelier de l'année» 2015 par le GaultMillau. 

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Jérôme Aké Béda
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«On n’est pas Vaudois si on n’aime pas le chasselas!» affirme Jérôme Aké Béda en souriant, les vignes de Lavaux autour de lui. Né en Côte d’Ivoire, cet épicurien s’est fait une place sur la scène viticole suisse. Désormais directeur de l’Auberge de l’Onde à Saint-Saphorin, il met un point d’honneur à valoriser le cépage endémique de la région qu’il aime tant, à coups de références anglophones revisitées à la sauce vaudoise. Sur le flanc de sa BMW brille la devise «In chasselas we must trust!» Et si cette préférence n’était pas assez claire, la voilà actée sur son tablier en jean: «Chasselas or not chasselas?»

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En remontant à la source de cette passion, Jérôme Aké Béda raconte les aventures de ses débuts en Suisse, dans les années 1990, à 25 ans. «Je n’y connaissais rien en vin, avoue-t-il. Je venais de finir l’école hôtelière en Côte d’Ivoire, la première ouverte dans le pays grâce à une collaboration franco-canadienne. A ce moment-là, j’ai ressenti le besoin de mettre mes connaissances en pratique dans un pays européen. La Suisse n’était pas mon premier choix, mais en suivant les conseils d’un de mes professeurs, c’est ici que je suis venu. J’ai tout de suite été fasciné.» Fraîchement arrivé, Jérôme Aké Béda fait d’abord ses preuves dans plusieurs restaurants à Vevey et voit naître son intérêt pour le vin chez le chef gastronomique Denis Martin. 

«En Afrique, nous n’avons pas de vignes, sauf peut-être un peu en Afrique du Sud et au Maghreb. En Côte d’Ivoire, nous buvons du vin en poudre que nous mélangeons avec de l’eau, se remémore-t-il en souriant. Ici, les gens grandissent dans la culture du vin. C’est quelque chose de familial. Mais je suis la preuve vivante qu’il n’est jamais trop tard pour apprendre.» Auprès de Denis et Clara Martin, il se familiarise avec les saveurs, développe sa sensibilité gustative et agrandit son vocabulaire. «Lorsque je les entendais parler de vin, je notais les mots que je ne comprenais pas et les cherchais dans le dictionnaire.»

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C’est au cours de cet apprentissage qu’il est «tombé amoureux» du chasselas. Aujourd’hui, il parle avec malice de ce cépage auquel il est désormais notoirement associé. Il admet que le chasselas lui inspire une certaine poésie, à l’image de la culture suisse et de la «vaudoiserie» desquelles il découle. Des aspects qu’il considère essentiels à prendre en compte dans son travail quotidien. Jérôme Aké Béda décrit par exemple le métier de sommelier comme celui d’un porte-parole des vignerons auprès des clients. «Nous devons nous intéresser à leur travail. Ce sont finalement eux qui font le vin. C’est toute une philosophie et un bon sommelier est celui qui va aller chercher ce qu’il y a derrière le verre qu’il boit», insiste-t-il. Attaché à la notion de terroir, il perçoit le sol sur lequel pousse la vigne comme un ADN à part entière. En travaillant à Saint-Saphorin, au cœur de Lavaux, il se considère comme «un homme heureux». 

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En 2015, sa consécration par le GaultMillau a fait le tour du monde. «Beaucoup de médias sont venus me voir. Il y avait même une interview de moi dans les magazines des avions qui rallient Paris à Abidjan!» raconte-t-il avec fierté. Une notoriété qu’il associe lui-même à la légère surprise que sa victoire a provoquée dans le secteur de la sommellerie, un milieu traditionnellement très fermé: «Les personnes qui excellent dans ce domaine sont souvent issues de la culture du vin. Par extension, ce sont surtout des Blancs. En me voyant parmi les références, les gens sont parfois étonnés. Mais je n’ai jamais ressenti de racisme ou d’ostracisme.» Sa popularité dépasse les frontières, tout comme l’intérêt grandissant pour le vin et l’œnologie. Il remarque que cette passion s’exporte: «Je vois qu’il y a des bars à vins qui ouvrent à Abidjan. C’est incroyable! Je n’aurais jamais cru voir ça. Il y a beaucoup de choses à faire en Afrique, mais il faut en avoir les moyens financiers.» Jérôme Aké Béda n’exclut pas d’investir dans cette activité et de jouer un rôle d’exemple pour le développement du secteur du vin en Côte d’Ivoire. 

SUISSES AOP

Jérôme Aké Béda, le «pape» du chasselas venu de Côte d’Ivoire

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Leurs métiers sont typiquement suisses et leurs origines sont diverses. Dans cette série d’été, «L’illustré» vous fait découvrir le parcours professionnel et personnel de cinq Suisses AOP (Aux Origines Plurielles). Aujourd’hui, partons à la rencontre de Jérôme Aké Béda. Venu de Côte d’Ivoire et installé en Lavaux, ce passionné de chasselas a été élu «Sommelier de l'année» 2015 par le GaultMillau.  
publié le 7 juillet 2022 - 08:34