Et s’il était en Suisse? L’affaire Xavier Dupont de Ligonnès s’avère hors norme à bien des égards. Et imaginer que le fugitif le plus recherché de France se trouve sur notre territoire ne constitue pas une piste aberrante dans le cadre d’une enquête qui dure désormais depuis dix ans et dont bien des bas et quelques hauts ont rythmé l’actualité.
Il y a d’abord un constat: cet homme qui a décimé sa famille pour ensuite partir se balader tranquillement à travers la France ne donne pas l’impression de vouloir attenter à sa vie. Xavier Dupont de Ligonnès a disparu une dizaine de jours environ après la commission de ses terribles actes dans le sud-est du pays et, depuis, sa traque piétine.
L’affaire a été relancée l’été dernier par la formidable investigation du magazine Society qui a démontré que toutes les pistes n’avaient pas été correctement explorées par les enquêteurs. Le travail du magazine français se terminait sur l’éventualité d’un rebondissement potentiel à l’étranger. Pourquoi pas en Suisse?
C’est ce que nous avons tenté d’établir. S’il est toujours vivant, l’assassin le plus célèbre de France – et une des personnalités les plus marquantes du crime de ces dernières décennies – a eu besoin de soutien. Lui et sa famille ont tissé un lien solide avec les milieux intégristes catholiques. Dire que cette version de la foi peut constituer un réconfort après avoir commis des crimes aussi graves n’est pas exagéré. Son Eglise pouvait dès lors constituer logiquement un refuge.
Les responsables d’Ecône se montrent de manière inattendue très ouverts sur la question. Et rappellent une constante: au titre d’une tradition d’hospitalité inconditionnelle, les monastères sont souvent sollicités pour accueillir des criminels. Quitte à accueillir – parfois sans le savoir – ceux qui n’ont pas encore été interpellés. En distanciant la justice des hommes et celle de Dieu, nos interlocuteurs ouvrent une incroyable possibilité.
Comme Jean-Claude Romand après avoir purgé sa peine – lui aussi quintuple assassin de membres de sa propre famille – ou la compagne du pédocriminel Marc Dutroux, Xavier Dupont de Ligonnès pourrait bel et bien s’être mis à l’abri dans une telle communauté religieuse. En Suisse ou ailleurs, cette possibilité paraît vraisemblable.
>> A lire, l'enquête de L'illustré en trois épisodes: