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Mois du cancer de l'enfant

Enfant et cancer: le combat de Natalie, au-delà du deuil

En ce mois de sensibilisation à la maladie, trois mères aux prises avec le cancer de l'enfant ont enregistré une chanson pour l'association Zoé4life et parlent de leur combat. Premier des trois témoignages: Natalie, maman de Zoé, décédée en 2013.

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Natalie Guignard, maman de Zoé et cofondatrice de l'association Zoé4Life, «a repris le combat» après le décès de sa fille en 2013. Julie de Tribolet

Pour Natalie Guignard, Vaudoise de 43 ans, le combat contre le cancer n’a jamais cessé. Il est sans fin. Sa petite Zoé, atteinte d’un neuroblastome, a succombé il y a six ans. Mais la nature optimiste de cette mère Courage lui a permis de tenir bon. Pour elle, l’expression «faire son deuil» n’a pas de sens. «C’est comme s’il devait y avoir une fin», dit celle qui aime à croire aux signes lorsqu’une libellule bleue, la couleur préférée de Zoé, vient se poser sur son épaule ou que le chiffre 5, le favori de sa fille, apparaît dans sa comptabilité.

Directrice et cofondatrice de Zoé4life, Natalie et l’association font avancer la recherche, l’accès aux soins et triompher la vie. «C’est sous l’impulsion de Nicole Scobie, rencontrée à l’hôpital lorsque nos enfants étaient en traitement, que nos amis se sont mobilisés pour créer l’association. Après le décès de Zoé, nous avons décidé de continuer.»

>> Voir le clip de l'association Zoé4life*:

Carence

La première raison est le manque de fonds alloués à la recherche. «Le monde ne se rend pas compte de cette carence. C’est souvent lié au peu d’intérêt de l’industrie pharmaceutique pour le cancer pédiatrique, pas assez rentable. Le traitement des adultes, lui, a fait des progrès considérables. Il y a des millions de malades», insiste celle qui ne goûte pas non plus l’expression «elle a perdu la bataille». «Comme si Zoé n’avait pas été assez forte. Après s’être battue pendant cinq ans, ma fille m’a passé le flambeau.»

La fillette au regard rieur, source de vie et de joie, irradie toujours, son énergie positive porte le combat maternel. «Lorsque je vois avec quelle facilité on peut mobiliser des milliards pour reconstruire une cathédrale, j’aimerais que l’on place l’enfant au centre de nos priorités. Zoé4life existe depuis six ans. Cela ne me console pas mais ça donne une signification à ce qui vient après. Parce que la mort d’un enfant n’a pas de sens.»

Comme beaucoup de parents face au diagnostic, Natalie avait arrêté de travailler afin de se consacrer à sa fille. Une perte de gain nette pour le couple qui voit les dépenses se multiplier, inattendues et non remboursées. «Selon les statistiques, on achète des gants ou du désinfectant pour 600 francs par an. Suivant les kilomètres, les frais liés aux déplacements du domicile à l’hôpital peuvent, dans certains cas, atteindre plus de 7000 francs.»

Suisse à la traîne

L’un des problèmes majeurs rencontrés par les familles est l’absence de congé parental. «En Suisse, nous sommes très en retard dans ce domaine. L’assurance perte de gain couvre l’employé, pas l’enfant de l’employé. Or, nous sommes empêchés de facto. Sans la présence des parents, le personnel hospitalier serait débordé. Nous sommes des partenaires indispensables.» Les exceptions sont rares. «Nicole Scobie, cofondatrice de Zoé4life, est contrôleur aérien. Son employeur ne pouvait pas se permettre de jouer avec la sécurité à cause d’un déficit d’attention, il a fait marcher son assurance pendant deux mois.»

D’abord bénévole, Natalie Guignard a franchi le pas. «Je suis désormais la seule salariée depuis 2018. Reprendre une activité dans mon domaine – les assurances – aurait impliqué des absences et m’aurait contrainte à décaler mes activités pour l’association. A cette idée, le comité exécutif (six bénévoles en plus d’elle, ndlr) s’est un peu affolé.» Sans compter sa fille aînée, Lana. «Elle est ma priorité. Je peux organiser mes horaires, avoir mon bureau à la maison.»
Zoé4life est bien rodée. Elle a récolté quelque 630'000 francs de dons en 2018 et en espère 900'000 cette année. «C’est notre budget, nous aimerions même pouvoir le dépasser.»

Faire face aux premières dépenses

Dès qu’une famille est confrontée au cancer de son enfant, Zoé4life lui verse 1000 francs dans les quarante-huit heures. «C’est une centaine de cas par an. La démarche s’effectue avec les assistantes sociales de l’hôpital. Cela permet de faire face aux premières dépenses. On peut renouveler cette somme si un enfant doit partir dans un autre hôpital en Suisse ou à l’étranger pour une partie du traitement.» Depuis 2014, plus d’un demi-million de francs ont été versés.

Le spectre des activités de l’association est large. «Elle est la seule à prendre en charge les frais en lien avec les procédures de préservation de la fertilité – prélèvement de tissu ovarien ou testiculaire – afin de permettre à l’enfant soumis à des traitements lourds d’enfanter plus tard. C’est un budget de 80'000 francs par an.» Pour Natalie Guignard et le comité de Zoé4life, il s’agit de soigner plus et mieux. «Notre partenariat avec le Groupe d’oncologie pédiatrique suisse a permis de financer des protocoles inexistants dans notre pays.»

Rôle de caution

L’association sert aussi de caution financière. «La Suisse ne bénéficie pas des avantages européens. Nous avons garanti 50 000 francs à une famille qui devait envoyer son enfant à Paris. La somme a permis d’ouvrir les portes de l’hôpital. Au final, l’assurance a accepté la prise en charge.»

Il y a aussi la longue liste des médicaments ignorés par l’assurance de base. «Des traitements destinés aux adultes ne sont pas couverts par l’assurance maladie lorsqu’ils concernent des enfants.» Des chimios, par exemple. «Récemment, une maman a dû faire le buzz afin d’obtenir gain de cause auprès de sa caisse.» Idem pour l’assurance invalidité. «Le cancer doit s’être développé pendant la conception et non après la naissance.»

Un décès d’enfant par semaine

Le cancer de l’enfant, que l’on dit rare, concerne 1% de personnes touchées. «Il affecte 250 à 300 enfants par an en Suisse, 35 000 en Europe. C’est la deuxième cause de mortalité infantile après les accidents. Chaque semaine, chez nous, un enfant décède du cancer.»

>> A lire, deux autres témoignages de mamans d'enfants malades d'un cancer:


* Une chanson et un clip pour la vie

Difficile d’écouter «Zoé pour la vie» sans avoir la gorge nouée. Cette chanson épurée est un hommage à la petite Romande emportée par un cancer il y a six ans, deux jours avant son 5e anniversaire. Elle a été co-écrite par Natalie Guignard, sa maman, Gaëlle Solioz et la chanteuse Angie Ott, piano et voix. Ces deux dernières vivent respectivement la rémission et la rechute de leur enfant.

Les paroles reprennent les expressions naïves de cette fillette solaire qui a rendu son dernier souffle le 26 octobre 2013, après avoir vu son souhait exaucé: rencontrer Winter, un dauphin blessé, en Floride.

«Donne-moi la chance de guérir»

Si la chanson Zoé pour la vie nous bouleverse, c’est qu’elle questionne: «Je suis plus là, et dis-moi, c’est quoi ton rêve à toi?» Un chœur d’enfants ajoute: «Donne-moi la chance de guérir, donne-moi la chance de grandir.» Mis en vente depuis le 1er septembre pour marquer le mois de sensibilisation au cancer de l’enfant, ce CD est né de la rencontre d’un trio de mamans devenues sœurs de cœur dans l’épreuve. «Nous n’étions pas prédestinées à nous rencontrer. Le destin en a décidé autrement.»

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  DR

Les profits seront intégralement versés à Zoé4life. «Nous vivons des choses tragiques qui en font naître de belles», souligne Natalie Guignard. Un crowdfunding actif jusqu’à la fin du mois a permis d’enregistrer le titre et de produire un clip. Chaque franc récolté ira à la recherche pour le cancer pédiatrique.

Le CD «Zoé pour la vie», vendu 5 francs, soutient la recherche sur le cancer de l’enfant.

>> Pour commander le CD:  www.zoe4life.org/zoepourlavie


Par Dana Didier publié le 5 septembre 2019 - 08:56, modifié 18 janvier 2021 - 21:05